Une après-midi de septembre 2010, je montais sur une scène du 94 pour shooter mes premières photos de concert : devant moi, quatre jeunes mecs, dont on m’avait dit beaucoup de bien en coulisses, dont j’ignorais tout, hormis qu’ils étaient de noir vêtus, tout mignons gentils en installant leur set, « Bonjour Madame » … et complètement incontrôlables une fois lancés.
Une gifle, puis deux puis trois, … 45 minutes de live plus tard, j’étais conquise, amoureuse, et je ne les ai plus lâchés depuis, suivant leurs progrès avec l’attention d’une mère louve, montant leur premier gros interview, observant leurs répets, écoutant leurs maquettes, les retrouvant de concerts en messages Facebook.
Deux ans et demi plus tard de galère à se battre pour s’imposer, faire muter ce son incroyable pour en canaliser l’énergie, partir en tournée en Russie, passer à l’autoprod, et se sortir ce deuxième album des tripes : en un mot devenir hommes. Nos loups-garous ont su apprivoiser leurs mutations, en résulte Hellequin, serti de 10 morceaux à la composition complexe, alambiquée, où la formation classique de ces messieurs se ressent fortement dans la discipline et la symétrie à peine.
Et toujours ce regard ironique et mordant sur notre monde et ses bassesses, contradictions qu’ils s’amusent à souligner d’un sourire de démon désabusé, Jekyll modernes qui se mêlent jusqu’au morphing absolu pour devenir un seul Hyde, sans se confondre pourtant, riches de personnalités contrastées et complémentaires, nous racontant leur initiation dans une odyssée qui redéfinit les basiques du métal tout en collant un gros de pied dans ce qui ne doit surtout pas devenir une institution.
Notons plusieurs points forts :
– la tête sur les épaules et une perception très juste des écueils et des dérives du milieu, de ses règles également qui conduit aujourd’hui les labels à miser sur des projets déjà en voie de réalisation ;
– l’autonomie donc qui les amène à investir dans ce projet, concevant leur groupe comme une véritable entreprise où chacun endosse sa part du job, et qui traduit de sacrés tempéraments, celui des winners qui ne s’en laissent pas compter et tracent leur route à la sulfateuse ;
– la capacité à hybrider les influences, jusque dans les nuances de la voix, la puissance des cymbales, les riffs de guitare, brisant les rythmes, les soutenant d’une sonorité cristalline inattendue et féminine dans ce déluge de notes saturées de testostérone, ajoutant une touche d’électro, de ska, de reggae au détour d’une compo comme on le ferait d’une cerise confite sur une mine antipersonnelle,
– une tendance à produire des chansons qui claquent, accrochent l’oreille, restent à l’esprit et résonnent comme autant d’hymnes, de chants de guerre, sans tomber dans les affres du tube bête, méchant et commercial, bref des putains de succès en devenir
– le pouvoir de balancer ces tracks dans la foule comme une charge de cavalerie, le vent des dieux en colère, et de faire imploser une salle et le public devant eux qui en redemande à genoux.
A ce stade, on peut le dire, les loups garous ont marqué le point et passé le cap, entrant dans le professionnel avec la hargne des passionnés, qui respirent la musique comme d’autres l’oxygène, conscients qu’ils doivent tout construit de leurs mains.
Il était temps de faire un bilan, que nous effectuons avec Adrian le chanteur et ZarC le batteur, tranquillement installés dans les coulisses de la Boule Noire, qu’ils ont réquisitionnée pour le lancement du nouvel album, et qu’ils s’apprêtent à incendier une heure plus tard.
Petit bilan donc avec des lycanthropes d’un calme olympien avant la tornade de la métamorphose, abordant la signification d’Hellequin, sa logique, le son qui en fait la qualité :
Merci à Enemy of the Enemy.
Photos du concert :
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Photos des coulisses :
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Et plus si affinités