Louise Dutertre pour Umoove
Le jeudi 3 avril – Musée du Quai Branly (Paris)
Rencontre entre deux univers, celui de la danse et de la musique, entre deux artistes et leur groupe, Gregory Maqoma le chorégraphe sud-africain et sa compagnie The Vuyani Dance Theater, et du trompettiste de jazz franco-suisse, Erik Truffaz et son Quartet, Kudu mêlent des mondes, des cultures pour une proposition originale.
Fort de ses jeunes interprètes, Gregory Maqoma a pris pour point de départ les longues cornes spiralées du Kudu, sorte d’antilope du continent africain. Des cornes utilisées comme instrument de musique dont les sons ne sont pas sans rappeler ceux de la trompette. Rencontre entre deux compagnies, entre deux continents, et dont émane une belle fraternité artistique.
Entre ritualité et spiritualité, des hommes et des femmes se cherchent, s’observent. Invitation là encore à la rencontre entre féminin et masculin, entre terre et ciel. Légèreté et puissance s’allient pour donner corps au groupe. La jeunesse caractérisant la majorité des danseurs présents sur le plateau n’empêche pas chacun d’eux d’incarner cette force fluide, cette douce et néanmoins assurée rondeur. Les gestes sont vifs, pleins d’élans et de fulgurances même si au bout d’une heure de présence sur scène certains semblent donner des signes de fatigue.
C’est toujours un réel plaisir de voir ces danseurs s’exprimer avec une telle jubilation dans des moments joyeux et ludiques, comme dans des moments où l’intensité dramatique s’impose. La danse s’incarne ici comme une jouissance. Elle est volubile, diffuse, explosive, retenue… elle passe par des tas de couleurs et de formes. Et lorsque ce métissage, intrinsèque à la culture sud-africaine, affirmé par la danse du chorégraphe sud-africain, se lie à l’univers coloré, envoûtant et captivant du jazzman, il en ressort forcément un moment de grâce. « Lors de cette création, nous avons vécu une émotion rare, nous nous sommes tous sentis enveloppés par une magnifique énergie qui nous libérait de nos entraves habituelles », note le compositeur à ce sujet.
Créée dans le cadre de la saison France-Afrique du Sud 2012-2013, et de Marseille Provence 2013 Capitale Européenne de la Culture, Kudu s’est montée en peu de temps, une bonne semaine de travail commun à Johannesburg, affirme Erik Truffaz. Même si ce spectacle est le fruit d’une belle collaboration, où la fusion d’univers différents fonctionne bien, celle-ci eut été certainement encore plus fructueuse avec un temps de travail plus long. Ceci afin que les mondes artistiques de chacun s’interpénètrent bien plus encore.
On le perçoit notamment lorsqu’un des danseurs, le soliste, enchaîne de fabuleuses rythmiques avec ses pieds et que s’adressant au batteur celui-ci peine à l’accompagner et à jouer le jeu de questions/réponses auquel il est invité. Du côté chorégraphique, même si la danse est incarnée avec élégance et vitalité, on peut noter quelques longueurs. Notamment lorsque les danseurs reviennent de temps à autre à cette corne symbole. Sa manipulation prenant parfois le dessus sur le fond et ce qui est exprimé, on s’y perd un peu.
Kudu est cependant, malgré ces quelques points, une pièce à l’énergie communicative, pleine de grâce et de couleurs. Un moment toujours précieux en ces temps de grisaille ambiante.
Et plus si affinités