Créée en 2005, La pièce Toc-Toc n’en finit plus depuis de tourner partout en France comme à l’étranger. Un succès mérité : si l‘histoire rocambolesque tissée par Laurent Baffie est hilarante à souhait, elle s’avère par ailleurs d’une rare pertinence, touchante autant que juste. En perspective : la grande misère mentale de l’homme moderne.
Une salle d’attente… et pas de psy
Imaginez la salle d’attente d’un célèbre psychiatre spécialisé dans le traitement des tocs. S’y retrouvent six patients, affublés de pathologies des plus cocasses pour nous, mais pas évidentes à gérer pour eux : Fred, atteint d’un syndrome de Gilles de la Tourette, passe son temps à insulter son entourage à son corps défendant, Vincent est obsédé par le calcul, Bob ne vit que pour la parfaite symétrie et refuse de marcher sur des lignes, Marie, entre deux prières, vérifie constamment qu’elle a bien ses clés, Blanche est terrifiée par les microbes, Lily répète tout deux fois. Et bien sûr, le psy n’est pas là. Il va donc falloir attendre.
Psychanalyse sauvage
Situation banale, me direz-vous, mais avec pareils oiseaux, les choses vont vite se corser, l’impatience et le stress aidant. Présentations, découvertes communes, attentes et déceptions, très vite nos toqués vont prendre leurs pathologies en main, en mode thérapie de groupe et action commando. Une psychanalyse sauvage en quelque sorte, qui va porter ses fruits, aussi étrange que cela puisse paraître, et à notre insu, nous spectateurs happés par la déferlante de gags qui nous secouent de rire.
Un texte subtil
Et nous font songer aussi. Difficile de ne pas se reconnaître un peu dans chacun de ces personnages ô combien attachants, tous isolés par leurs travers, incompris par leurs proches excédés, coincés dans ces obsessions dont ils voudraient tant se débarrasser. C’est la clé du texte de Baffie, qui abandonne pour un temps son esprit provo habituel pour écrire un texte des plus intelligents et subtils sur un sujet d’actualité, allant même jusqu’à concocter une fin étonnante qui en amusera plus d’un.
À voir comme un excellent spectacle de boulevard et pour le tour de force que représente l’interprétation de ces personnalités borderline, tout particulièrement Lily, dont toutes les répliques doivent être doublées à l’identique, ce qui représente un challenge sportif pour une actrice.