Des plaques émaillées sur des murs blancs reflétés de miroirs, un zinc d’époque, des sièges authentiques recouverts d’un velours chatoyant, … entrer Chez Léon est déjà une expérience en soi, un moment particulier où l’on rompt les amarres du quotidien pour entrer en parenthèse, faire une pause et embrasser l’épicurisme à pleines bouchées. L’endroit porte un passé glorieux : 80 ans à recevoir personnages importants, politiciens, acteurs, venus trouver un peu d’intimité assis à ces tables, sur ces banquettes confortables. Même les héros y trouvent leur place, ainsi le grand commissaire de Simenon, Maigret, dont une plaque de cuivre rappelle l’emplacement favori.
80 ans et une intronisation littéraire : un patrimoine qui en auraient fait fuir plus d’un, effrayé à l’idée de reprendre pareil flambeau. Pour Julien Valensi et Victor Lenorman, ce fut au contraire un coup de foudre. Immédiat, complet, dévorant. Les deux amis d’enfance, motivés par un vieux projet commun de restauration furent conquis. Le lendemain ils investissaient les lieux l’inaugurant le 5 février 2014. Avec succès car depuis, l’endroit attire et séduit. Avec justice, avec justesse. La carte maîtresse de ces deux messieurs ? L’exigence. Exit la bistrologie et les concepts hype en vogue actuellement, ils veulent du concret, de l’authentique et du bon, sans tomber dans le pédantisme trop souvent associé à la gastronomie, ce qui induit :
- des mets de valeur, renouvelés au rythme des saisons, venus de producteurs français qu’ils repèrent et visitent eux-mêmes, n’hésitant pas à y passer des après-midi entières ;
- une cuisine de terroir, qualitative, qui tire ses raffinements de la valeur des produits et de l’inventivité des recettes élaborées par Carlos Javier Cabo leur chef ;
- la composition d’une équipe impliquée et passionnée, qui porte ce projet avec conviction.
Conviction est ici le second terme clé de l’équation. Julien et Victor ont fait leurs classes à l’étranger, barista en Australie pour l’un, directeur de restaurant en Suisse pour l’autre. A l’heure où nombre d’entrepreneurs choisissent l’exil, ils ont voulu revenir en France pour y construire, y défendre leurs valeurs, leur perception de la cuisine de qualité. Cela se traduit par une connaissance pointue des circuits d’approvisionnement, de l’histoire et de l’origine des spécialités impliquées dans les plats. Leur chef ? Ils l’ont recruté après plus de 70 entretiens, demandant à chaque candidat de leur cuire « une entrecôte bleue …mais chaude ». Originaire de Catalogne, Carlos fut le seul à réussir cette épreuve, amenant ainsi le savoir-faire d’un petit-fils de pêcheur, le parcours d’un pâtissier d’exception, l’inventivité d’un gastronome et la rigueur d’un grand professionnel. Alors que nous nous présentons pour assurer la dégustation, il choisit de réaliser des plats entiers et non de petites portions, cela afin que nous prenions mesure de l’équilibre des assiettes, de l’exigence du dressage.
Et de sa cuisine sortiront 3 entrées, 3 plats, et 3 desserts représentatifs de la philosophie de l’établissement :
– un carpaccio de bar serti de mesclun, de pomme, d’asperge et de betterave, le tout rehaussé d’une vinaigrette au citron d’une rare fraîcheur, un véritable bonheur de saveurs en cette nuit orageuse ;
– un foie gras de canard français des Landes, incrustré d’éclats de figue et d’abricot sec, accompagné d’une compotée d’échalote de Bretagne, le tout fondant dans la bouche avec délectation ;
– un crumble de Saint Marcellin IGP affiné, chaud et fondant, recouvert d’un muesli craquant de miel sucré accompagné d’une salade arrosée de vinaigrette au gimgembre rapé ;
– un dos de cabillaud en croûte d’amande, cuit à la perfection, reposant sur un lit de tagliatelle de carottes et une crème citronnée ;
– un cochon de lait fondant et croustillant aux légumes de saison et olives, dont les parfums fleurent bon le Sud et le soleil ;
– un hamburger Carlito, dont la viande est mêlée de chorizo Bellota, recouverte de Manchego affiné, de poivrons fondants, d’une sauce aux piquillos qui complètent harmonieusement les pommes baby grenaille fermes et savoureuses ;
– une tarte au citron repensée comme une mousse, fondante, parsemée de speculoos croustillants ;
– un tiramisu où le café, la crème et la pistache s’équilibrent, avec une point de fraise, un tour de force qui combinent les écoles italienne et argentine dans la confection des mélanges ;
– un café gourmand qui associe cheesecake aux oreo, dôme praliné piqué de gingembre frais et salade de fruits macérée dans une infusion de thé et de pomme avec un café de grande qualité.
En neuf plats, nous comprenons mieux le plan de route de ce trio, tandis qu’ils nous expliquent chaque recette, qu’ils nous présentent chaque produit : le thé Harney & sons, fournisseur officiel de la reine d’Angleterre, le pain de Jean-Luc Poujauran, élu deux fois meilleur pain de Paris, le Pouilly fumé du domaine Bruno Blondelet ou le Côte de Bordeaux Château Puygueraud 2009, tout ici est choisi avec soin, après avoir été goûté et vérifié. Ainsi l’équipe de Chez Léon construit sa carte sur un principe de renouvellement constant, assorti de suggestions du jour qui offrent au chef un champ de créativité très apprécié des aficionados, … pour des prix tout à fait abordables, et c’est là un autre point fort de Chez Léon : 12 euros pour le carpaccio de bar, 13 euros pour le foie gras, 8,50 pour le Saint Marcellin, … un repas complet s’évalue ici à une moyenne de 35 euros. Une politique de prix que Victor et Julien défendent avec conviction, ajoutant à leur volonté de qualité et d’originalité un sens de l’accueil et du conseil hors du commun.
Chaleur humaine, écoute, conseil, leur amour du métier, du terroir respire à chaque instant, dans leur discours, leur plaisir évident d’être là, administrant, goûtant, saluant les clients, servant, discutant … un élan qu’ils résument de façon très juste en citant ces deux préceptes inscrits sur le tableau dans la salle principale :
« Heureux qui peut savoir l’origine des choses « Virgile
« Je ne suis pas difficile, je me satisfais du meilleur » Churchill.
Tout un programme que ces messieurs n’ont pas fini de décliner avec imagination, rigueur et implication … pour notre plus grand plaisir.
Mille mercis à Victor, Julien, Carlos et leur équipe pour cet accueil, cette passion.
Merci à Benjamin G. pour ses conseils et son appréciation.
Et plus si affinités
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