Pas évident de raconter les quarante trois années qui composèrent la brève existence de l’auteur de Boule de suif. Car il faut bien l’admettre, Guy de Maupassant n’a pas eu une vie de tout repos, noyant ses angoisses existentielles de grand nerveux dans un tourbillon de plaisir et de travail. S’étiolant dés qu’il était enfermé, que ce soit en classe, en internat, dans une administration ou dans un couple, Maupassant passa son temps à fuir, et la biographie de Frédéric Martinez se cale sur le rythme frénétique de ces évasion successives, sans en amoindrir la cadence.
Une vision peu amène de l’humanité
Grand voyageur parcourant le Maghreb aussi bien que la Riviera, passant de la Normandie à Paris dans un souffle, navigateur infatigable, il n’était bien qu’en mouvements, observant le monde au fil de ses errances. Enfance auprès de Laure, la mère aimée, seul visage féminin de valeur, éducatrice et soutien, rapports tendus avec un père incapable et déserteur, très vite Maupassant eut une vision peu amène de l’humanité. C’est cette approche critique et profondément empathique que le biographe traque à chaque ligne de ce récit palpitant qui suit le succès éclatant de ce romancier unique et provocateur, scandaleux et adulé qui finira dévoré par la syphilis. Poignant et juste, l’ensemble de ce récit aborde les étapes successives de cette conquête, puis sa chute dans les affres de la maladie.
Un portrait à configurations multiples
D’une plume vibrante qui rappelle la fougue de son modèle sans s’y substituer, Frédéric Martinez dresse un portrait à configurations multiples, démontant avec beaucoup de flair les passerelles entre la réalité du vécu et la densité de l’œuvre. Poète d’abord, puis chroniqueur, nouvelliste, romancier enfin et quel romancier, Maupassant ici prend ancrage dans un paysage littéraire d’une richesse incroyable, où il pénètre sous la houlette du grand Flaubert « son vieux » pour y croiser Zola et les naturalistes, les grands peintres et les femmes d monde de son époque. Extraits de correspondance, articles, préfaces, le livre multiplie les anecdotes qui font du grand auteur un être vivant à nos yeux, et c’est ce qui en fait la valeur.
Et plus si affinités