Prix du Jury du festival de Cannes ex aequo avec le dernier film de Godard, Mommy sait se faire remarquer. Xavier Dolan, réalisateur canadien de tout juste 25 ans nous éblouit avec son cinquième long métrage. Sans artifices, il explore au plus profond la relation d’une mère et de son fils aux limites de la folie.
On a aimé, vu et revu ses précédents films, J’ai tué ma mère, Les amours imaginaires, Laurence Anyways ou Tom à la ferme. Nouveau fils prodige du cinéma il y a développé des thèmes aussi passionnants que polémiques : le transexualisme, l’homosexualité ou l’amour à trois. Ici, dans Mommy tout est plus simple, l’histoire se résume ainsi : un fils TDAH impulsif et violent exclu du système de soins traditionnel retourne vivre avec sa mère veuve et économiquement défavorisée. Engagés dans une lutte pour survivre, ils vont découvrir Kyla leur étrange voisine et vivre à trois l’expérience de la vie et de l’attachement.
Le film est tout d’abord beau. On ne vient pas découvrir un documentaire sur la pédopsychiatrie, on assiste à une fable sur la folie. Les troubles de l’attachement de Steve ne sont plus réduits à quatre lettres du DCSM IV, sa difficulté de vivre, sa recherche de résilience sont transmis au spectateur qui peut difficilement retenir son émotion. La BO nous transporte dans ce magnifique voyage où tout est possible en restant toujours dans une cruelle réalité. Le prendre soin d’une mère et d’une amie prend le pas sur une psychiatrie institutionnalisée. Cherchant au plus profond de l’humain, analysant chaque personnage avec une justesse déroutante, Dolan ouvre les yeux du spectateur comme le format du film.
Un film où une rencontre peut changer le destin, où l’amour maternel même avec ses limites est inconditionnel. Spectacle de chaque instant, Céline Dion, héroïne nationale nous transporte, les couleurs pastel et ce magnifique québécois rendent ce film esthétique. Un film jamais moralisateur qui reste didactique, laissant le spectateur s’interroger : l’amour est il ambigu ? La folie est elle inaliénable ? La résilience peut elle prendre le dessus ? Dolan sait filmer les émotions, au plus près des visages, il n’épargne personne. Ici on ne cache rien, la souffrance se retrouve dans ces yeux inondés de larmes, les moments de joie se lisent sur les lèvres de l’adolescent, la détresse nous touche dans l’expression de la mère. On a rarement si bien transmis la honte et la solitude que pendant cette scène au karaoké à la limite de l’insoutenable.
Thème central du film, la communication. Notion difficile dans une époque empreinte de ses nouvelles formes émergentes, notion particulièrement compliquée à l’adolescence et capacité humaine souvent brisée quand elle se confronte à la folie. Pourtant une autre forme de communication semble s’exprimer ici dans ce trio formidable, l’attachement. Une mère désespérée, jamais désespérante, un enfant en difficulté plus que jamais attachant. Xavier, promets nous de refaire des films comme celui-ci, de réussir à toucher au plus profond de notre humanité. Continue à filmer ta belle culture québécoise, fais nous rire par votre vocabulaire si différent de notre français de France. Continue à être ce chirurgien de notre conscience, plus poète que médecin. Fais nous aimer Céline Dion et découvrir la beauté d’un coucher de soleil sur une banlieue modeste et en difficulté. C’est surement la palme que tu aurais dû récupérer !
Et plus si affinités