Carmen Miranda, vous connaissez ? La star des 50’s fit frémir de désir le public des comédies musicales en mal d’exotisme. Vintage et polychrome, son turban orné de fruits tropicaux y fut pour beaucoup, presque autant que son nombril savamment dévoilé et tortillant en tout sens. Une icône, un cliché tropical. Il n’en fallait pas plus à la mutine photographe Natacha Lesueur pour se saisir du thème et joliment lui tordre le cou.
Turban, bijoux et fleurs décomposées
Sa Carmen à elle perd le lustre du technicolor pour préférer le prune et les tonalités plus sombres, plus ternes. Certes, elle se coiffe de vrais bulbes et de fleurs véritables pour poser devant l’objectif. Les colliers, les bagues et les bracelets sont là, à profusion, le maquillage appuyé, le décolleté exotique… mais quelque chose cloche dans ces compositions. Les couleurs éclatantes sont devenues fades, terreuses, à y regarder de plus près, le turban est orné de végétaux en voie de décomposition, flétris, séchés.
Faussement créole, un brin provocante
Le visage du modèle ? Marqué, ridé bien que toujours avenant et séduisant. Odeur lourde, parfum sirupeux et entêtant, légèrement écœurant… Languide, alourdie de ses ornements disproportionnés au cliquetis assourdissant, la dame nous regarde, amusée, interrogatrice, faussement créole, un brin provocante, visiblement ravie de la nausée fourbe qui nous envahit. Pas de titre, mais un rien d’ironie dans cette quiétude irritante de femme mature qui s’amuse du vieillissement naturel qu’elle affiche triomphalement.
Ailleurs baudelairien et plaquette touristique
Natacha Lesueur s’amuse ainsi de l’attirance enthousiaste pour l’Ailleurs baudelairien converti en plaquette touristique vintage, en carte postale kitch. L’ensemble déconstruit un peu plus le mythe de l’idyllique éden, de la femme condamnée à l’illusion de l’éternelle jeunesse si elle veut toujours séduire. Quelque chose de Ronsard dans ces orchidées défraîchies ? Une autre lecture du carpe diem au soleil de Caracas ? Ou l’acceptation comblée de l’expérience de vie ? Pas de réponse, bien sûr, à chacun sa perception.
Et plus si affinités
Pour en savoir plus sur le travail de Natacha Lesueur, consultez son site web.