«Dans deux ou trois heures tout au plus, ce garçon sera mort » : c’est sur cette affirmation on ne peut plus atroce que débute Le Manuel du Serial killer de Frédéric Mars. Oui … mais non. Les plus attentifs, les plus rompus aux mécanismes retords du polar et du thriller n’auront pas négligé de vérifier les pages antérieures à cette déclaration, et le petit avertissement qu’elles contiennent : «Le présent document est consigné ordinairement dans les archives du Centre médical fédéral de Devens (Massachussetts) sous la cote POM-HARR-ADA58-2012».
Faire concurrence à Hannibal Lecter
Ce simple avertissement change toute la donne, et va vous plonger dans un abîme de perplexité sans fond. Car dés les premières lettres de ce roman, on ne sait où se situer, ni au niveau de l’action, ni au niveau du style rédactionnel. Et on se retrouve vite dans la situation d’un Sherlock Holmes faisant appel à tout son bon sens pour débrouiller l’écheveau de l’incroyable, à se répéter en boucle le fameux mantra : « Lorsque vous avez éliminé l’impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est nécessairement la vérité ». Ouep sauf qu’ici, l’impossible à peine éliminé, se reconfigure comme un glitch en boucle, une erreur glissée dans la programmation des personnages.
En leur centre, l’anti-héros Thomas Harris. Oui vous avez bien lu, borgne et asocial, orphelin au passé lourd de secrets, l’étudiant d’Harvard qui nous raconte ici ses mésaventures d’une plume médusée, porte le nom du célèbre auteur, il y fait même référence, puisqu’il est lui-même un écrivain, débutant certes, mais extrêmement prometteur. Son premier succès ? Le Manuel du serial killer pardi, dont nous parcourons les conseils à intervalle régulier : choix des victimes, de l’arme, motivations, organisation, protection, mieux qu’une Bible, une méthode pour surpasser tous les Dexter de la terre et faire concurrence à Hannibal Lecter.
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Intrigue alambiquée à souhait
Cynique, froid, calculateur, l’ouvrage dés sa publication est un immense succès. A ceci près que le modus operandi qui y est exposé correspond à celui appliqué dans une série de crimes dont les enquêteurs ne savent plus comment se dépêtrer. Et que Thomas, propulsé romancier de génie sous les projecteurs médiatiques de tout le pays n’a aucun souvenir d’avoir écrit de best seller qui va lui valoir une avalanche d’emmerdements. Et l’obliger à fouiller au plus profond de lui-même pour exhumer des souvenirs peu reluisants et recomposer le parcours d’une existence chaotique marquée par le malheur et la violence.
Voici en gros les lignes de force d’un bouquin dont on ne peut en dire plus sans en dévoiler les arcanes et spoiler le début de la fin. Qu’ajouter sinon que les amateurs de scenarii complexes, embrouillés et ciselés vont adorer, que toute cette histoire a des parfums d’un Usual Suspects mâtiné de Vol au dessus d’un nid de coucou et de Psychose, et qu’une fois commencé le livre se dévore d’une traite, jusqu’au point final qui vous laissera bouche bée … et vous donnera grande envie de parcourir un autre opus de Frédéric Mars, histoire de goûter une autre intrigue alambiquée à souhait.
Et plus si affinités
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