Retour sur les bancs de l’école, les amours ! Voltaire vous attend, inscrit au programme des classiques poussiéreux. Candide, Les Lettres Philosophiques, Le Traité sur la tolérance, … déjà les moins courageux d’entre vous sentent poindre une vague nausée, d’autres baillent d’ennui… Courage pourtant ! C’est ici que surgit Frédéric Lenormand, volant à votre secours avec sa série Voltaire mène l’enquête. Objectif : s’inspirer de la vie du grand homme à la fine plume et la langue de serpent (quel persifleur ce Voltaire, mon Dieu) pour façonner des intrigues policières bien troussées où le penseur applique les règles de la raison au champ de l’investigation judiciaire.
Il est difficile de faire taire un Voltaire
Meurtres, vols, dissections, superstitions, théâtre, actrices et chocolat chaud, … on se croirait dans une peinture de Watteau. Malicieux, Voltaire contemple les cadavres avec circonspection, et toujours une fenêtre ou une porte pour s’enfuir … tout ça avec dans son sillage Émilie du Châtelet, opulente marquise pétrie de sciences et un brin son amoureuse, ainsi que pléthore d’ennemis prêts à embastiller le vil esprit au moindre écrit séditieux. Or, il est difficile de faire taire un Voltaire, surtout quand il se transforme en Sherlock Holmes … La Baronne meurt à cinq heures, Meurtre dans le boudoir, Crimes et condiments, Le Diable s’habille en Voltaire, Élémentaire mon cher Voltaire ! … dans tous ces romans, Lenormand dégage la littérature d’Arouet le Jeune de son étouffante gangue universitaire pour redonner vie et lustre au redoutable écrivain.
Faconde, traits d’esprits, ironie mordante
Dans un style irrésistible, le créateur du juge Ti quitte les pompes de l’Empire du Milieu pour s’infiltrer dans l’intimité des salons intellectuels qui largement contribuèrent à mettre bas l’ancien régime. Normal, le monsieur connaît très bien l’histoire de ce glorieux XVIIIᵉ siècle dit des Lumières… et il s’y trouve comme poisson dans l’eau. Faconde, traits d’esprits, ironie mordante, … croyant imiter le maître, Lenormand distille sa propre gouaille et c’est plaisir hilarant de le lire, ainsi quand il narre les facéties d’un auteur prêt à tout pour massacrer la tragédie française qu’il veut tant rénover.
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Une verve savoureuse
Drôle, à se tordre même, … mais si juste. Le romancier fait en partie acte biographique en s’appuyant sur des écrits, des lettres, des mémoires… ce que nous prenions pour une invention s’enracine dans le réel, respectant le caractère original et cocasse du philosophe. On ressort ragaillardis de ces chapitres titrés avec autant de fantaisie que ceux de Micromégas, avec une seule envie : parcourir les écrits de l’auguste personnage pour y trouver la source de cette verve si savoureuse, et réaliser à quel point il était d’avant-garde.