A la suite d’Intimité et de Seventeen programmés courant mai dans la capitale, le metteur en scène François Stemmer investit, à l’occasion de la Nuit des Musées, le centre Georges-Pompidou, le temps d’une déambulation performative intitulée Un ado, une oeuvre.
« Suivez-moi » telle est l’invitation floquée d’un sweat à capuche porté par deux jeunes filles. Les suivre dans les allées encombrées d’un musée exceptionnellement gratuit, c’est l’assurance de découvrir, sous une focale aussi fraîche qu’insolente, la vénérable institution pompidolienne.
Tout commence, sous un immense luminaire niché dans une alcôve où gazouillent deux demoiselles aux voix parfaitement maîtrisées, puis c’est au tour d’un jeune graffeur de réinterpréter le bleu électrique d’Yves Klein. Sur une plaque de plexiglas, il écrit consciencieusement la formule du International Klein Blue créée par le marchand de couleur Édouard Adam à la demande de l’artiste français. Une dizaine de minutes lui suffit pour réinterpréter, face à un public très concentré, IKB3 Monochrome Bleu. Tout à côté, horrifiée, La Mariée de Niki de Saint Phalle, n’en revient pas de cette outrance toute urbaine.
Plus loin, incongrûment, résonne un Ba moin un ti bo fort à propos : les joies décalées des désordres de la Nuit des Musées. Puis « Suivez moi » reprend sa marche. Les badauds – marmaille, japonais vissés à leur Nikon, hipsters et étudiants en art – se prêtent au jeu. La foule grossit et migre au fur et à mesure de la pérégrination. Nouvel arrêt face à un échalas d’ados.
Encadré des œuvres d’Ellisworth Kelly et François Morellet, tout en abstraction géométrique, un jeune danseur entame un très lent striptease qui aboutit à une inspection minutieuse de sa naissante musculature d’homme. N’en pouvant plus de ses simagrées, il se lance à corps perdus dans une bondissante danse. La musique disco résonne fort dans le musée. Ambiance assurée. Les minots s’ébaudissent de cette institution se déridant à coup de beats ; les parents soufflent aussi : l’artiste aura pudiquement gardé son caleçon lors du striptease.
Enième station de cette étrange performance : Luxe, calme et volupté. Le jeune auteur-compositeur Hugo Jardin se lance dans une longue et envoûtante logorrhée, accompagné de sa guitare sèche. Les plus observateurs d’entre nous prétendent avoir vu danser les vahinés du tableau de Matisse. Mirage des îles quand tu nous tiens !
Suite et fin de cette errance performative. Au sous-sol, non loin du Studio 13/16 à l’origine de ce Un ado, une œuvre, est donné un concert d’Hugo Jardin avec en arrière fond pour décor les ascenseurs du musée qui ne cessent de monter et descendre. D’une troublante sincérité, la vingtaine passée depuis quelques mois, Hugo nous narre ses amours adolescentes et bien d’autres chimères ; le public claque des doigts, tape du pied, assis en tailleur dans cet immense hall du centre.
Dans la multitude de propositions qu’offraient les musées parisiens, cet Ado, une œuvre fut assurément une des plus rafraîchissantes. Encore une fois, Monsieur Stemmer fait mouche !
Et plus si affinités
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https://ciefrancoisstemmer.com/un-ado-une-oeuvre/