Après avoir revisitéBarbe Bleue il y a 3 ans, Amélie Nothomb décide de s’attaquer au conte de Perrault, Riquet à la houppe. Décoiffant ?
Un quart de siècle ! 25 ans déjà qu’Amélie Nothomb nous livre, de manière métonymique à chaque rentrée littéraire, son nouveau roman. En 1992, l’inaugural Hygiène de l’assassin avait, à juste titre, ravi critique et public, puis Stupeur et tremblement raflé le Grand prix du roman de l’Académie française 7 ans plus tard. Mais au fil de livraisons un peu trop attendues et de la bruyante sur-médiatisation qui les accompagne, on avait abandonné l’auteure pour en découvrir de nouveaux. A l’occasion de ce chiffre rond que représente ces 25 ans, n’était-il pas temps de revenir vers Amélie et de poser cette inévitable question de septembre en forme d’inoxydable marronnier : que vaut le nouveau Nothomb, ici Riquet à la Houppe?
Le cru 2016 propose une relecture du conte de Perrault publié il y a plus de trois siècles, soit la narration en parallèle du parcours de vies (de l’enfance à la rencontre finale) de deux héros atypiques que tout oppose : Déodat, garçon exceptionnellement laid mais très intelligent et Tremière, jeune fille particulièrement belle mais simple d’esprit. Lui fera un parcours particulièrement brillant, faisant fi de sa hideur ; elle, peinera à se faire une place dans la société malgré son statut envié de mannequin. Ensemble, ils goûteront finalement au bonheur. Tout est bien qui finit bien donc, conte oblige.
Amélie Nothomb offre au conte de Perrault une (re)mise en situation contemporaine qui loue les mystères de la nature humaine et ceux, tout aussi nombreux, du sentiment amoureux. Prénoms improbables, univers aux confins de l’extraordinaire, le tout troussé dans un style fluide et élégant qui tient dans moins de 200 pages : la recette Nothomb n’a pas bougé d’un iota depuis 92 et fonctionne plutôt bien. Grande nouveauté cependant : le bel optimiste qui se dégage du dit Riquet. Si bon nombre des romans de l’auteur belge se déploie à partir de situations embarrassantes voire étouffantes, en total contraste avec son style (tantôt léger, tantôt sadique) apparentant certains opus à des contes de fées désenchantés, Riquet à la Houppe joue la carte du Tendre et de la légèreté.
On rit, mais du jaune habituel, ce qui rend l’ouvrage si singulier et aimable. Originales aussi ces 6 dernières pages qui reviennent sur les liens qu’entretiennent littérature et amour. Un conte doit-il toujours se conclure sur une note heureuse ce qui le rendrait d’office niaiseux ? Un bon roman d’amour doit-il finir mal (en général) pour être respectable ? Amélie Nothomb livre là le fond de sa pensée. Brillant et pétillant. De là à lire la livraison de septembre 2017, 2018, 2019, 2020 …
Et plus si affinités
http://www.albin-michel.fr/ouvrages/riquet-a-la-houppe-9782226328779