Une jeune fille voilée, vêtue d’un blouson, avec un sac marqué «hallal » ; elle contemple un distributeur automatique où l’on trouve un ensemble de produits des plus décalés : carte de crédit, bouteille de gin, méthode pour perdre son accent, chorba en poudre, botox … Avec dérision et émotion, l’artiste Kader Attia traduit ainsi le décalage culturel vécu par les jeunes français d’origine maghrébine.
Conçue pour la Biennale de Venise de 2003, cette installation clôt l’exposition consacrée par le Musée National de l’Histoire de l’Immigration aux différentes étapes de l’exil et de l’ancrage. Elle précipite de manière drôle et brutale les clichés qui fascinent ces populations : le besoin de modernité, d’intégration dans une vie occidentale, le rappel des racines, d’une appartenance culturelle et religion, d’un patrimoine linguistique, de valeurs …
La Machine à rêve distribue les fantasmes d’une intégration en réalité complexe, où gommer ses singularités n’est peut-être pas la meilleure des solutions. Elle est désir, elle est illusion. Trouvera-t-on au terme de son voyage ce qu’on attendait initialement ? Une fois arrivé, ne faudra-t-il pas dépasser le cap de la déception pour construire sa propre route, ses références, sans rien attendre de personne ?
Derrière cette vitre, c’est la société de consommation, trompeuse et manipulatrice, qu’on saisit d’un produit à l’autre, pleins de fausses promesses. On aura beau avoir l’ensemble de ces produits, sera-t-on pour autant accepté ? Jusqu’où faudra-t-il abdiquer ce qu’on est pour être intégré ? Chacun lire cette œuvre à l’aune de son propre vécu, mais personne ne restera indifférent devant cette confrontation silencieuse et solitaire qui trahit l’errance des consciences, le sentiment d’abandon et le désir farouche de trouver sa place.
Et plus si affinités
http://www.histoire-immigration.fr/collections/la-machine-reve-de-kader-attia