Certes c’est une vieillerie datant de l’aube du XXIeme siècle mais elle a son intérêt : en revenant sur ces lieux de spectacle sacrifiés aux impératifs de l’économie et de l’urbanisme, Les Théâtres parisiens disparus redessinent la carte d’une capitale dédiée de longue date à l’art dramatique.
Parus en 1999 aux Éditions de l’Amandier (aujourd’hui fermées), cet ouvrage conséquent est signé Philippe Chaveau qui y consacra vingt cinq années de recherches assidues. La tache fut conséquente, ardue, pénible même, à fouiller des milliers d’archives qu’il fallut ensuite synthétiser pour d’une part répertorier tous ces espaces, ensuite les raconter, restituer leur âme, leur vécu.
L’auteur s’y emploie avec patience et concentration, rigueur. Au fil de cette liste alphabétique (l’axe le plus commode pour rendre compte d’un pareil patrimoine) c’est l’histoire d’un genre qui émerge de page en page, la variété d’une architecture, l’évolution d’une discipline, d’une profession que nous découvrons, avec intérêt, émerveillement et mélancolie.
Car ces temples oubliés reflètent une vie créative d’une diversité incroyable, adaptable aux exigences du public et de la censure tout en œuvrant pour préserver qualité et excellence. Le Grand Guignol témoigne de cette diversité parfois provocatrice, avec sa programmation horrifique et sanglante. Il n’est qu’un exemple parmi tant d’autres d’un goût prononcé pour le divertissement, qu’il soit évasion ou réflexion.
Ce livre conséquent prouve par ailleurs que l’aura d’une capitale est en grande partie produite par les structures culturelles. Appelées à vivre leur vie et leur mort, elles surprennent par un renouvellement constant, une salle fermée étant très rapidement remplacée par une autre, pour proposer une projet autre, un nouveau regard, une programmation d’avant-garde.