Sympa comme titre, non ? Cela dit tout de la relation d’amour et de haine que Dee Dee Ramone a entretenue avec l’un des plus célèbres combos punk que l’Amérique a enfantés, combo dont il fut l’un des fondateurs et l’une des victimes, et dont il nous raconte les déboires dans une autobiographie haute en couleurs. Un rescapé donc, de justesse, en sursis, avec de nombreuses séquelles, une rancœur évidente, et le sentiment d’un profond gâchis mêlé à la fierté d’une gloire en demi-teinte.
Revenu momentanément de la came, de l’industrie vampirique du rock, d’une formation de potes qui va très vite tourner au cauchemar, chacun tirant la couverture à soi, faisant les pires crasses aux autres. Et Dee Dee de raconter cette propulsion avortée avec une ironie confinant au cynisme, étape par étape depuis l’émergence dans les bas-fonds new-yorkais jusqu’aux tournées internationales, les albums qui s’enchaînent, les inimitiés qui s’enracinent, la détestation enfin, entretenue par l’alcool, la came et les gonzesses à outrance.
A chaque chapitre le sentiment d’une incohérence, d’un positionnement ubuesque : ces gamins complètement paumés sont des stars mais manquent toujours de fric, leurs deniers passant dans la drogue principalement, ils se comportent comme des voyous attardés mais sont le jouet de l’industrie qui les drive sans pitié, manager à l’appui, ils attirent les foules par leurs chansons rebelles, mais s’enferment dans un uniforme, une attitude qui les entrave, même jean, mêmes baskets, même blouson de cuir, mêmes lunettes noires.
Des clones, en somme, qui vont s’entre dévorer. Dee Dee de plus en plus défoncé, désireux de se singulariser, sera finalement viré sans ménagement, avant de se tourner vers d’autres expériences musicales, l’écriture de ses mémoires, … puis la mort, par overdose comme il se doit. Avant de sombrer dans le néant, il témoigne d’une scène rock en pleine mutation, de rencontres et d’amitiés avec les fleurons de cette période maudite mais si fourmillante, Johnny Thunder, Steve Bator et j’en passe, compagnons de beuverie, de shoot surtout, de studio parfois, qui pour la plupart précèdent Dee Dee dans la mort …
De tout cela que reste-t-il ? Des vidéos, des disques, des morceaux de bravoure, des photos, des souvenirs … et des tombes. On referme ces pages avec un sentiment trouble de tristesse et de fatalité. « I don’t want to grow up » chantaient-ils … S’ils ne s’étaient pas copieusement bousillés avant l’âge comme des Peter Pan suicidaires, ces mecs seraient-ils devenus des héros, les figures tutélaires d’une révolte aujourd’hui rangée au musée, comme un spasme merveilleux et vomitif d’insolence/indolence, une légende faite de boue et de horse, trop vite fantasmée par des gamins en quête d’idoles à brûler ?
Et plus si affinités
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