Après Adorabilis, le programme des Plateaux de la Briqueterie se poursuit le vendredi après midi avec un univers complètement différent de celui de Jonas et Lander. En effet, Ingrid Berger Myhre nous propose Blanks, sa dernière création. La jeune chorégraphe norvégienne use de différents outils (la vidéo, l’écriture, la musique, le scotch, un ballon…) comme autant de prétextes à créer du mouvement, à faire du corps un corps dansant et à le regarder comme tel. La danse d’Ingrid Berger Myhre émane de mesures, d’écoute, de sensations, de projections. Elle est en mouvement permanent même lorsqu’elle ne bouge pas vraiment ou lorsqu’elle se cache du public. On perçoit chez cette jeune femme une acuité vitale. Le moindre geste est lié à des signes qu’elle développe aussitôt qu’ils apparaissent ou qu’elle les fait apparaître. Le corps souple, léger, elle dégage l’espace, le travaille comme une matière sensible à l’image d’une sculptrice. Blanks est un spectacle non spectaculaire. Tout y est écrit et pensé fortement. Et c’est peut-être là que le bas blesse !
La légèreté avec laquelle Ingrid Berger Myhre déploie ses procédés et processus, nous entraîne dans cette façon de voir la danse et de s’interroger sur le moment où elle apparaît. Mais rarement, nous nous sentons concernés par les sensations qu’elle traverse. Le spectateur est en dehors de la matière même. Blanks développe une sorte de contrariété pour celui-ci. Ce spectacle met en mouvement la danseuse-interprète et l’on s’amuse de tous les argumentaires et outils dont elle use pour ce faire, mais dans un même temps il y a une forme de neutralité et de froideur dans ses processus qui nous laisse pantois. Une faible empathie s’exprime, car nous sommes amusés de la voir s’amuser mais de là à être dans l’émotion, la sensation ou le ressenti à proprement parler, il y a un grand fossé. Le travail d’Ingrid Berger Myhre est assez conceptuel et ne s’enquiert pas de raconter une histoire, de nous faire partager des émotions liées à des états de corps. Il en est ainsi et il doit donc être pris comme tel, même si les attentes sont parfois autres.
Et plus si affinités