Bardé de récompenses, plébiscité ! Enfin nous venons de visionner Bohemian Rhapsody, soit la geste filmique du mythique groupe de rock Queen, depuis ses débuts jusqu’à la consécration du concert planétaire Live Aid, le tout drivé par un Bryan Singer tout à fait inspiré dés qu’il s’agit de parler de super héros.
Mythique : c’est bien le souci. Comment restituer la carrière exceptionnelle de ces quatre gars visiblement touchés par la grâce, en préservant l’aura légendaire de leur formation, sans trahir des biographies complexes qui risquent à tout moment d’étouffer le récit d’une créativité hors normes ? Il fallait trancher : Singer privilégiera la légende et la créativité. Si son film suit le parcours de Mercury et sa bande, il n’entre guère dans les détails d’analyses beaucoup plus pointues et intimistes (pour cela, il y a de nombreuses biographies que nous vous engageons du reste à parcourir pour votre édification personnelle et votre culture générale).
Sex, drugs and rock’n roll : la formule consacrée par Ian Dury s’applique à la lettre à Queen comme à tous les grands combos de l’époque, mais Singer choisit d’évoquer la chose de manière discrète, se contentant d’aborder l’homosexualité de Mercury avec nuance, refusant d’étaler les turpitudes alors dénoncées dans les tabloïds pour mettre en avant la complexité, la richesse et la profonde solitude du personnage (big up du reste à Rami Malek qui mérite largement les trophées le récompensant pour cette prestation d’anthologie), ainsi que les liens forts qui unirent les quatre musiciens contre vents et marées (et Dieu sait s’ils en connurent).
Donc pour les scènes de came et de cul, d’orgie et de débauche, vous repasserez : Singer délibérément et avec un brin d’angélisme, se concentre sur la musique, ces moments de folle créativité qui accouchèrent des succès que l’on sait, ici particulièrement bien mis en avant pour souligner le caractère profondément innovant de Queen et sa volonté sans faille. La séquence où ils claquent la porte de leur label à coup de parpaing parce qu’ils ne veulent pas lâcher le projet « Bohemian Rhapsody » est profondément jouissif et absolument prophétique.Leçon à retenir : il ne faut jamais lâcher.
Une chanson expérimentale qui engendre l’opéra rock dans toute sa splendeur baroque, tout comme « We will rock you » devient le premier hymne participatif de l’histoire de la musique moderne. Les anecdotes ne manquent guère, qui émaillent ce récit touchant et finalement très juste, jusque dans la restitution des ambiances de concert, ce climax de Wembley qui clôt le film magistralement en posant le groupe dans l’attitude éclatante de héros cosmiques touchant au pinacle de la gloire, refusant l’ombre de la mort, se jouant d’elle avec élégance et désinvolture.
On le sait : raconter l’art au cinéma est délicat, beaucoup s’y sont essayés avec plus ou moins de succès, engendrant bides ou chefs d’oeuvre, parfois des bides devenus des chefs d’œuvre ce qui est encore plus cocasse. Tout comme The Rose de Rydell, The Doors de Stone ou Sid and Nancy de Cox, Bohemian Rhapsody est à voir et à apprécier, car il tente de saisir ce moment de démesure, le mystère de la composition, ce léger bémol qui distingue la compo lambda et kleenex du hit international, de la chanson appelée à devenir un oriflamme, un incontournable, un basique, une référence absolue. Au final, le véritable protagoniste de ce film, c’est la musique de Queen, et cela donne un frisson incroyablement bon.
Et plus si affinités