Extremely Wicked, Shockingly Evil and Vile : in bed with Ted Bundy ?

Alors, public ? Te voici orphelin de Game of Thrones? Fini les dragons, les massacres à la pelle, les scènes de cul et les plans larges de Winterfell sous la neige ? Plus rien à visionner ce soir ? Une série te manque et tout est dépeuplé ? Vais-je te conseiller de compenser en regardant Extremely Wicked, Shockingly Evil and Vile? J’hésite.

Un homme amoureux

Non pas que le film de Joe Berlinger soit un navet, loin de là. Mais si le fait de sauter des ruines de King’s Landing à la sanglante odyssée de Ted Bundy constitue déjà un grand écart culturel en soit, cette nouvelle approche d’un des tueurs en série les plus prolixes des USA risque de surprendre … car il s’agit ici de nous présenter un autre visage : celui de l’homme amoureux.

Oubliez donc le tableau dressé dans le true crime Ted Bundy : autoportrait d’un tueur que nous chroniquions en février. S’appuyant sur le livre The Phantom Prince : My life with Ted Bundy de Elizabeth Kendall, le réalisateur décide d’aborder la question du point de vue d’Elizabeth Kloepfer, qui eut la joie, en tout cas au début, de partager un temps la vie de Bundy, quand il était un jeune étudiant et un meurtrier débutant. Ce que la donzelle ignorait bien sûr, enamourée qu’elle était de ce prince charmant.

Adorable, serviable … et manipulateur

Car dans le privé, Bundy était absolument adorable, serviable et attentionné, du moins avec cette fille spécifiquement, qu’il a aimé jusqu’à la fin … et qu’il a surtout épargné, on se demande par quel miracle. C’est cette facette que Berlinger choisit d’explorer, gommant la réalité crue des meurtres pour se concentrer sur les rebonds d’une relation passionnelle absolue qui va tourner à la dévoration. Car vivre avec un tueur n’est pas sans conséquence, surtout quand il a un visage d’ange et qu’il jure ses grands dieux qu’il n’a rien fait de mal.

Nous découvrons donc l’effroyable vérité au rythme de cette héroïne malgré elle, qui voit progressivement son bel amour s’effondrer, tandis que le profil du psychopathe manipulateur prend son ampleur. Malsain à souhait, le scénario permet donc de saisir les failles qui émaillent progressivement cette personnalité dangereuse ô combien, en percutant avec violence le profil de cet individu intelligent et élégant avec cette sentence d’un juge : « Extremely Wicked, Shockingly Evil and Vile ».

La réalité des atrocités commises

« Extrêmement méchant, choquant et vil » : des termes sans appel qui résument le traumatisme ressenti par une Amérique soudain confrontée à ce qu’elle peut produire de plus nocif. Pour incarner ce monstre à deux visages, Zac Efron, dont la ressemblance avec Bundy est troublante, jusque dans ce sourire qui se fige en rictus de haine. L’acteur apporte l’impulsion nécessaire pour évoquer ce grand huit émotionnel constant, tandis que sa dulcinée, fragile Lily Collins, n’en finit plus de dérouler les méandres d’une vérité sordide.

L’approche de Berlinger est forte et subtile … pour ceux qui connaissent déjà bien le profil de Bundy, sa sanglante carrière et le comportement des tueurs en série. Un néophyte s’y perdra, et c’est là le hic. Car trop peu d’indices jalonnent l’intrigue pour éclairer ceux qui découvrent Bundy sur sa brutalité réelle et sa perversion profonde, dont on prend toute la mesure dans deux des dernières scènes, fulgurantes mais tardives. Jouer la carte de l’intime est intéressant, voire nécessaire mais fallait-il gommer la réalité des atrocités commises ?

Jongler entre les deux aspects était pourtant possible, si l’on se réfère au terrible Henry, portrait of a seril killer, qui n’épargne rien de la vie quotidienne d’Henry Lee Lucas ni de ses meurtres, les seconds étant totalement imbriqués dans la première, comme une évidence, une banalité. Bref, pour mesurer et apprécier la qualité de Extremely Wicked, Shockingly Evil and Vile, prenez le temps de vous informer sur Bundy en amont, et misez plus sur le thriller intimiste que sur la dérive gore à gros effets.

Et plus si affinités

https://www.netflix.com/fr/title/81028570

Delphine Neimon

Posted by Delphine Neimon

Fondatrice, directrice, rédactrice en chef et rédactrice sur le webmagazine The ARTchemists, Delphine Neimon est par ailleurs rédactrice professionnelle, consultante et formatrice en communication. Son dada : créer des blogs professionnels. Sur The ARTchemists, outre l'administratif et la gestion du quotidien, elle s'occupe de politique, de société, de théâtre.

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