Bon, ok, je ne suis pas que ça… Je suis aussi une étudiante de 21 ans en communication, passionnée de musique depuis mon plus jeune âge. Mais aujourd’hui, si j’écris, c’est parce que je suis en crise et que j’en ai marre de souffrir en silence. Pourquoi en silence ? Cette maladie concerne 1 femme sur 10, mais trop de personnes me disent encore « c’est quoi l’endométriose ? ». Et quand ils le savent, ils ne comprennent pas à quel point cette maladie est handicapante.
Premières règles, premières douleurs
Commençons par le début. Aussi loin que je me souvienne, mes douleurs datent de mes premières règles, à mes 11 ans. C’était au moment de la kermesse, j’ai été voir ma mère en pleurant parce que ma culotte était marron. Si j’avais su … Pendant les 3 années qui ont suivi, j’ai eu de grosses douleurs ; des maux de têtes, des maux de dos, des vomissements, des baisses de tension. Ma maman pensait que je trouvais tous les prétextes pour ne pas aller à l’école et moi-même j’y ai cru …
Ma première échographie date de mes 13 ans… J’ai commencé la pilule à ce même âge, parce que j’avais mes règles tous les 15 jours et les douleurs qui allaient avec … Ah, la pilule … ce petit comprimé qui vous dérègle, vous donne des migraines, vous met à fleur de peau, très sensible, trop sensible (je suis une hyper sensible je vous laisse donc imaginer ce que cela donnait …). J’ai donc choisi un autre moyen de contraception : l’implant. Ça n’a été guère mieux ; j’ai pris 18 kilos en 3 mois et je suis tombée en dépression. Ah les hormones, joie et bonheur…
L’impression de devenir folle
Et pendant tout ce temps, les douleurs s’atténuaient parfois mais elles ne disparaissaient guère. Elles avaient même tendance à s’intensifier. Et dans ces moments-là, on a juste l’impression de devenir folle. Surtout surtout quand les médecins déclarent : « c’est dans ta tête », « c’est normal d’avoir mal pendant les règles ». Eh oui, la société a décrété que c’est normal d’avoir mal une semaine par mois, de subir en silence la souffrance menstruelle, et de taire ce liquide rouge qui tache nos vêtements, qui nous empêche de travailler, de nous amuser.
Un jour, n’en pouvant plus, j’ai voulu prendre rendez-vous avec ma gynéco qui n’était pas disponible avant 3 mois. Je ne me voyais pas attendre aussi longtemps, c’était juste insupportable. J’ai donc demandé à une amie les coordonnés de la sienne. A ce moment, je ne le savais pas mais cette dernière allait me permettre mettre des mots sur ces années de souffrance. Je me revois assise dans son cabinet ; je lui raconte mes douleurs, l’intensité de celles-ci, quand elles surviennent … Elle me pose plusieurs questions, demande une IRM …Le résultat tombe enfin : « Vous avez de l’endométriose madame ! »
Coups de chaud et carrelage froid
A ce moment précis, deux sensations m’envahissent :
- Joie, je sais enfin ce que j’ai.
- Tristesse , ça ne va pas être simple de gérer.
Je savais ce qu’est l’endométriose grâce aux témoignages de Laetitia Millot, Enora Malagré ou encore Lorie Pester. Toutes en sont atteintes et l’ont dit. Je les remercie pour leur combat et leur message d’espoir. Mesdames, nous ne sommes pas seules ! Et pourtant parfois on a l’impression de l’être. Totalement. Pour ma part, ça passe par les crises. J’ai longtemps refusé qu’on me voit comme ça.
Les coups de chaud qui succèdent aux coups de froid … Une fois, une amie m’a retrouvée allongée dans ma salle de bain ; le carrelage froid est le seul moyen de calmer les bouffés de chaleurs qui me saisissent. Et puis ces douleurs qui vous prennent dans le ventre, pour vriller le dos, les jambes et parfois même les bras. Dans ces moments-là, je ne suis plus « Marine le rayon de soleil ». La douleur fait ressortir en nous les pires côtés, je suis à fleur de peau, je m’énerve très vite, je n’ai plus aucune patience.
Flegme, philosophie et soutien
Par contre je suis obligée d’avoir le sens de l’humour et de l’autodérision. Mon endométriose touchant la zone intestinale, je suis devenue la spécialiste des diarrhées-surprises ! Dans un bar, pendant un date. Quand cela arrive, deux options : s’écrouler, morte de honte ; assumer avec flegme et philosophie. Cette maladie vous met au pied du mur. Pour ma part, j’ai décidé que, même si l’endométriose ne me définit pas, elle fait partie de moi. Ma manière de la combattre, de mieux la supporter ? En parler, être transparente. Non pour me plaindre, mas parce qu’être cash, c’est encore le meilleur moyen d’informer et d’impliquer. Les femmes … et les hommes.
Eh oui, Messieurs, ce combat c’est aussi le vôtre. L’endométriose est la deuxième cause d’infertilité chez les femmes. Et si vous ne pouvez pas connaître ces douleurs, votre soutien est indispensable pour épauler votre compagne atteinte de cette saloperie, la rassurer, l’encourager, lui dire que ça va aller … et que vous n’allez pas l’abandonner, que vous êtes là. J’ai eu la chance d’avoir du soutien. Un ami m’a entendu faire les 100 pas dans mon appartement à 5h du matin. Il s’est levé, est venu me rejoindre, m’a fait rire avec ses blagues, m’a prise dans ses bras, m’a veillée.
Accepter d’être vulnérable
Autre petite anecdote : atteinte de kystes (autre joyeuseté consécutive à l’endométriose), j’ai vu mes amis débarquer chez moi pour me soutenir, ce qui m’a valu un de mes plus beaux souvenirs de crise, à manger deux camemberts en buvant du vin et en rigolant, entre deux spasmes insupportables. Pour une fois, cette maladie n’a pas pris le dessus. J’avais mal mais je suis restée souriante. Parce que j’ai accepté qu’ils me voient comme ça, vulnérable … Mais qu’est-ce que ça fait du bien !
- Si cette maladie vous pousse dans vos retranchements, elle vous contraint à vous écouter, vous observer, et à en tenir compte. Aujourd’hui, bien qu’hyperactive, je sais quand je dois m’arrêter. Et au plus fort des crises, j’écris. Comme je le fais ce soir du reste. Exprimer mes souffrances, c’est une manière de les dompter. De me soulager. Et de vous sensibiliser. C’est aussi le but de ce témoignage.
- Si vous êtes atteinte de cette maladie, n’oubliez pas qu’il y a autant d’endométrioses que de personnes atteintes. Même si vous n’avez pas les symptômes que d’autres subissent, vous n’en êtes pas moins malade. Soyez bienveillante envers vous-même, apprenez à vous aimer et à prendre soin de vous.
Et si vous faites partie de l’entourage d’une personne atteinte, informez-vous. Soyez à l’écoute de cette personne, elle aura parfois besoin de vos bras pour se rassurer, ou de rester seule sans réconfort tellement elle aura mal. N’en prenez pas ombrage, restez tout prêt pour l’aider quand elle remontera de sa douleur. Et surtout renseignez-vous, parlez-en autour de vous. Si vous souhaitez plus de renseignements n’hésitez pas à vous rendre sur le site de l’association EndoFrance.
Marine SCHLIENGER