Nous avons commencé la semaine en force avec La Meute et #SalePute. Autant continuer sur notre lancée avec une focale sur le film Nine to five aka Comment se débarrasser de son patron. Une focale plus légère puisqu’il s’agit d’une comédie… datée de 1980. Et déjà à l’époque, le réalisateur Colin Higgins évoque la question du sexisme au travail ; et c’est déjà odieux.
Un gros con à qui on a donné trop de pouvoir
Elles sont trois à bosser au service comptabilité de la très puissante entreprise Consolidated :
- Violet, malgré ses nombreuses compétences, son sens de l’organisation, son extrême agilité, n’arrive pas à grimper les échelons alors qu’elle a le potentiel et l’âme d’une leader;
- Doralee, serviable et bien roulée, passe pour la suceuse de service, adepte de la promo canapé … alors qu’elle est d’une droiture exemplaire, fidèle à son époux ;
- Judy, la dernière arrivée, a bien du mal à s’adapter aux réalités du secrétariat après plusieurs années de vie au foyer soldée par un divorce douloureux quand Monsieur a décidé de la placer pour une jeunette.
Elles n’ont initialement rien de commun sinon qu’elles opèrent sous les ordres de Franklin Hart Jr., directeur tyrannique, baiseur impénitent, menteur congénital. Ce dernier exploite ces dames sans vergogne, vampirisant les idées de la première, voulant baisouiller la seconde, traitant la dernière comme une demeurée. Bref un pur archétype du mâle prétendu alpha dont le cerveau réside dans le caleçon, mal élevé, profiteur, manipulateur, incompétent … en d’autres termes, un gros con à qui on a donné trop de pouvoir.
Faire péter le plafond de verre
Seulement voilà, à forcer de tirer sur la corde, elle casse. Les trois amies rêvaient de se débarrasser de ce patron pour le moins indélicat ? L’inconscient va parler, les actes manqués se succéder … Hart va dépasser les bornes, et les trois donzelles perdre patience. Le Monsieur est kidnappé, séquestré, surveillé comme du lait sur le feu. Quand à nos trois copines, elles vont expliquer son absence par moult prétextes … et prendre les décisions à sa place. Le tout avec force rebondissements et gags cocasses, menés bille en tête par le super trio Jane Fonda – Lily Tomlin – Dolly Parton, avec dans le rôle du mâle pas si dominant que ça un Dabney Coleman parfait de cynisme imbécile.
Le film est à se tordre, certes, les péripéties s’enchaînent tandis que les trois héroïnes s’affirment, et prennent la place qui leur est due après avoir neutralisé ce manager indélicat. Comme quoi, il suffit de balayer un pion sur l’échiquier pour faire péter le plafond de verre. Cette fable met bien en évidence les clivages qui régissent le monde de l’entreprise, le sexisme qui y règne, la manière dont les femmes sont enfermées dans des rôles qu’elles alimentent d’elles-mêmes jusqu’au jour où elles décident de dire non et proposent LEURS solutions. Si le ton est burlesque, l’esthétique 80’s, le propos est toujours d’actualité et c’est bien ça qui gêne.
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Quarante ans après sa sortie, Comment se débarrasser de son patron fait rire et mal à la fois. Rien n’a changé, sauf que la guerre des sexes n’alimente plus la farce mais apparaît comme une tragédie, un drame social inacceptable. Le film peut se savourer comme un très bon divertissement, mais aussi et surtout comme un apologue sur lequel méditer, notamment les dernières minutes qui en disent long sur cette conviction que seul l’homme peut être force de proposition, la femme une simple exécutante. La période est aux remakes ? Il serait bon de tourner Comment se débarrasser de son patron dans une version 2020 éclairée par les #balancetonporc et autres revendications égalitaires : cela devrait donner un film on ne peut plus savoureux ; qui s’y colle ?