Quand on pense Pierre Bergé, on évoque immédiatement Yves Saint-Laurent. Comme s’ils étaient indissociables. C’est vrai certes, mais incomplet. Le parcours de Pierre Bergé mérite d’être évoqué seul, comme le démontre la très belle biographie Pierre Bergé – Le pygmalion.
Un refus total de l’obéissance et de la médiocrité
Éditée en 2020, cette évocation signée Véronique Richebois et Alexandre Debouté revient sur le long et prolixe parcours d’un personnage tout ce qu’il y a de balzacien. Dès sa plus tendre enfance, Bergé se singularise par un esprit brillant et un refus total de l’obéissance et de la médiocrité. C’est en véritable conquérant qu’il monte à Paris après avoir volontairement raté son baccalauréat.
Il s’impose très vite dans les hautes sphères de la capitale. Ses armes ? La culture, le sens de l’observation, l’art de la conversation. Et un profil de décisionnaire qui sait détecter les bons interlocuteurs, constituer et exploiter un réseau d’influence, deviner les besoins, les attentes. Cet homme de l’ombre à l’homosexualité affirmée propulse ses amants/artistes dans la lumière.
Un des derniers beaux esprits à la française
Faiseur de célébrités ou cynique qui grandit dans l’ombre de génies ? On le lui a reproché, oubliant un peu vite que c’est sa présence, sa volonté, son analyse, sa formidable énergie, son flair de businessman également, qui vont participer pour beaucoup au succès flamboyant et international de la maison YSL, après la mise en orbite du peintre Buffet.
Deux réussites parmi tant d’autres, à mettre au crédit de ce capitaine d’industrie particulièrement pointu et intelligent, qui va amasser une fortune considérable doublée d’une collection d’art et de livres rarissime. Parti de rien ou presque, Pierre Bergé apparaît ici comme un des derniers beaux esprits à la française, un homme d’affaire élégant et inflexible, possédant une vision et des convictions, jusque sous les ors de la République.