Sur le terrain de la prod de séries, on les savait prolifiques, créatifs et barrés : les Coréens prouvent une nouvelle fois leur savoir-faire avec l’épileptique Bargain : Le prix à payer. 6 épisodes menés tambour battant pour explorer les bassesses de l’espèce humaine en situation de survie.
Un survival hystérique
Tout commence dans une chambre d’hôtel paumé au fin fond de la cambrousse coréenne, avec un marchandage pour le moins sordide : une lycéenne, Joo Young qui tente de vendre son pucelage. L’acheteur ? Un quadra bien décidé à réduire au possible le million de wons qu’exige la donzelle pour sa défloration. Malaise devant ce « bargain » initial qui en annonce beaucoup d’autres. Car ce que Hyung Soo, l’acheteur, ne sait pas, c’est qu’il vient de se faire piéger par un réseau de trafic humain, avec à la clé la mise aux enchères de ses organes.
Une première surprise, de taille, qui en annonce beaucoup d’autres au fil de ce survival hystérique déroulé avec frénésie sur 6 chapitres de 27 minutes chacun. Un rythme soutenu donc, en mode jeu vidéo, où tous les personnages vont être amenés à négocier avec leur prochain pour :
- rester en vie (pas évident évident avec une bande de tueurs adeptes de l’équarrissage aux trousses) ;
- sortir de cet hôtel/labyrinthe/piège en ruines, ravagé par un séisme, à moins qu’il s’agisse d’autre chose ?
- et au passage piquer le pactole que le gang planque quelque part dans une chambre du bouclard.
Sanglant, cynique, sans pitié
Voici les enjeux à l’œuvre dans Bargain, qui s’affiche un cocktail survitaminé de Tunnel, Squid game et Ocean’Eleven, avec une bonne grosse touche de gaming spirit, dans la cadence, les plans, le décor, les situations. Sanglant, cynique, sans pitié : le plus manipulateur/menteur/endurant vaincra. Une vision peu réjouissante d’une humanité prompte à la monstruosité quand elle se retrouve acculée au pire. Monstrueuse et compétitive, du moment qu’il y a un bon paquet de fric en jeu. Pour la solidarité, on repassera ?
Et le scénariste/réalisateur Sung-Woo Jeon de s’en donner à cœur joie pour étaler les travers de l’être humain soit disant civilisé, en fait corrompu jusqu’à la moelle. Et c’est peut-être ce qui fait sa poétique beauté si l’on en croit ce petit bijou de générique, une vision florale et colorée de l’organisme. Car c’est de cela qu’il s’agit au fond : qu’est-ce que c’est d’avoir des tripes ? Au propre (quoi que) et au figuré. Dans un univers apocalyptique pensé comme les spirales infernales de Dante.
Il y aurait presque du Guy Ritchie dans la logique de ces protagonistes jusqueboutistes qui se croisent, s’évitent, s’entraident ou s’éventrent selon les affinités. Le tout se laisse regarder malgré un sentiment de gêne évident ; c’est que le réal a un don certain pour coller sa caméra à l’action, privilégiant les plans surprises qui décuplent la portée des retournements de situation et des révélations qui les accompagnent. Narrativement, c’est accrocheur, y a pas à dire. Avec en prime le cliffhanger final qui appelle bien sûr une suite.
Résumons : avec cette petite perle, Paramount+ s’offre le luxe d’une série séduisante dans la veine du très prisé Squid game. De quoi faire la nique à Netflix ? Il y a de ça.
PS : à regarder en V.O. ! On avait commencé avec la version anglaise, on a lâché au bout de deux minutes. C’était inconsistant, décalé, bref, ça ne passait pas. En coréen, c’est vraiment une autre affaire, preuve que la langue d’origine joue aussi son rôle, et pas des moindres, dans l’œuvre.
Et plus si affinités