Elle a tout pour plaire et pourtant, sous ses airs de poupée, Petite Doll incarne une féminité torturée jusqu’à l’automutilation, explorant ainsi les psychés désaxées d’une génération de filles percluses de culpabilité, jusqu’au tréfonds de leur être.
La souffrance réelle de soi
Chevelure soigneusement coiffée, visage de porcelaine à peine rehaussée de rose, robe fleurie, chambre d’adolescente nuancée de pastel, regard rêveur, de portrait en portrait, Petite Doll décline les poncifs de la féminité angélique, femme enfant à la candeur bien trompeuse. Car sous cet amoncellement de dentelles, la souffrance est là, presque palpable. La souffrance réelle de soi, la souffrance rêvée de l’Autre. Une incursion dérangeante et malsaine dans les fantasmes d’Alice au pays des merveilles ou de Lolita…
Des yeux rougis par le chagrin et les anxiolytiques, un cœur qu’on s’extrait à la pince pour en atténuer les insupportables battements, le crâne fendu afin de réparer ce cerveau indomptable, source de tant de déceptions, le regard métamorphosé en fontaine de vin… aucune douleur en surface, anesthésiée, l’héroïne, peu importe la couleur de sa chevelure, le vêtement porté, le supplice subi, paraît insensible à son calvaire.
Une soumission volontaire et béate
A moins qu’elle en accepte le déchirement, qu’elle y trouve un sens, une pulsion de vie ? Une raison d’être et de combler ce vide qu’elle ne peut expliquer, mais qui la ronge ? Aucune réponse, les mises en scène de Giulia Grillo, l’artiste italienne à l’initiative de Petite Doll, n’ont pas vocation à éclairer un message dont le caractère acidulé est volontairement opaque. Histoire de pousser le spectateur à la réflexion, l’introspection, l’identification ? Ou d’exorciser des peurs intimes, des troubles ancestraux, une version 5,0 de l’hystérie ?
Peu importe tant que ces images ô combien fortes et impitoyables exercent leur fascination, cette poésie si spécifique de la cruauté, une sorte de soumission volontaire et béate. L’univers de Petite Doll alimente sa propre fatalité avec une discrète délectation, à l’image des porcelaines écorchées de Jessica Harrisson, des princesses made in Disney que Rodolfo Loaiza malmène dans ses tableaux. Bien plus qu’une esthétique du bizarre, c’est une véritable philosophie que porte Petite Doll, une mentalité qui mêle miel et fiel, se délecte du sang dans les larmes, toujours avec une ombre de sourire.
Et plus si affinités
Pour en savoir plus sur cet univers, consultez le compte Instagram de Petite Doll.