Qu’est-ce que l’addiction ? Comment se conjugue-t-elle ? Peut-elle inspirer une esthétique ? voici les trois problématiques inscrites au cœur de la démarche artistique de Javier Aguilera.
Une humanité sous emprise
Espagnol d’origine, Javier Aguilera se distingue par des sculptures réalistes qui en disent long sur l’évolution d’une humanité biberonnée aux réseaux sociaux et autres dérives numériques. Ses bustes détaillent une jeunesse soumise aux diktats d’une pop culture teintée de soft power. Netflix, mangas, tatouages, super héros, zombis, skateurs, rockers… peu importe l’âge, le sexe, la vie, la mort, les personnages d’Aguilera sont sous emprise. Et ils aiment ça.
Vomissant des pilules acidulées bourrées d’on ne sait trop quel psychotrope, iels ont les yeux dans le vague à l’âme de l’ennui et des rêves inaccessibles. Pas de perspectives, des coups et du sang, sales et dépenaillés, ils stagnent, un pâle sourire aux lèvres. Évoluant entre The Kid et Ron Mueck, ces bustes réalistes ont tout de la poupée désarticulée, du pantin abandonné dans un coin du grenier, et qui s’invente une vie pour ne pas en crever.
Piégés dans la matrice
Le regard est amer, cru, sans concession. Le « modern junkie » peut avoir plusieurs visages, sa religion est toujours la même, l’oubli dans le grand aveuglement médiatique offert par la digitalisation de notre société. L’oubli, l’isolement, le repli sur soi. Le travail d’Aguilera a quelque chose des Mythologies de Roland Barthes qui écrivait, à juste titre : « l’idée première du monde perfectible, mobile, produira l’image renversée d’une humanité immuable, définie par une identité infiniment recommencée. »
Un peu comme ces figures qui n’en finissent plus de se ressembler, jusque dans des signes supposés distinctifs qui s’avèrent récurrents, car dictés par une mode qui uniformise, broie, formate. Univers de logos, hommes-sandwiches, tous.tes sont piégés dans la matrice. Seuls un froncement de sourcil, une lèvre retroussée, un sourire figé traduisent une souffrance intérieure qu’on ne veut pas laisser transparaître dans cette injonction permanente au bonheur et à l’épanouissement.
Pour en savoir plus sur l’univers de Javier Aguilera, consultez sa page Instagram.
Et plus si affinités ?
Vous avez des envies de culture ? Cet article vous a plu ?
Vous désirez soutenir l’action de The ARTchemists ?