2024 : année de célébration du centenaire du mouvement surréaliste. L’occasion de parcourir Milly La Forêt, sur les traces d’un certain Jean Cocteau. Entre la demeure du poète et sa tombe située dans la chapelle Saint-Blaise des Simples, le village préserve la mémoire de ce grand artiste aux 1001 talents, une mémoire en partie teintée des valeurs du surréalisme.
Une relation complexe avec le surréalisme
Jean Cocteau (1889-1963) est une figure emblématique de la scène artistique française. Porté sur l’écriture dès son plus jeune âge, il se fait connaître par ses recueils de poésie avant de s’illustrer dans de nombreux domaines : théâtre, cinéma, dessin, et même musique. Son œuvre est marquée par un goût prononcé pour l’innovation et l’expérimentation, et il n’hésite pas à brouiller les frontières entre les genres artistiques. Parmi ses œuvres les plus célèbres, on compte les films La Belle et la Bête et Orphée, ainsi que les pièces de théâtre La Machine infernale et Les Parents terribles.
Pluridisciplinaire, Jean Cocteau a toujours entretenu une relation complexe avec le Surréalisme. Il rejoint le mouvement de façon indirecte, à travers ses amitiés avec des figures majeures comme André Breton ou Louis Aragon dans les années 1920. Toutefois, il n’a jamais adhéré pleinement aux dogmes du groupe ; Breton, du reste, le critiquait pour son refus de se plier aux règles strictes du surréalisme militant. Il n’en demeure pas moins que l’univers créatif de Cocteau s’apparente par de nombreux traits à ce courant artistique.
Un univers entre poésie, rêve et symbolisme
L’homme de lettres se distingue par une exploration de l’imaginaire, des rêves, et des mondes symboliques, ce qui résonne fortement avec le surréalisme, centré sur la libération de l’inconscient. Son œuvre est empreinte de visions poétiques et d’une approche onirique, que l’on retrouve dans des œuvres cinématographiques telles que Le Sang d’un poète (1930), où il mêle réalité et rêve de manière subtile. En termes de création littéraire, ses œuvres poétiques, notamment Les Enfants Terribles (1929), révèlent un penchant pour des atmosphères irréelles, un jeu avec les symboles, et une distorsion du temps et de l’espace.
Ces éléments sont au cœur du surréalisme, même si Cocteau, avec sa vision plus classique et mythologique, reste à part du mouvement. Ainsi, bien qu’il ne soit pas directement affilié au surréalisme, Cocteau en a absorbé les aspects oniriques et la liberté créative, fusionnant rêve et réalité pour créer son propre univers, à la fois poétique et symbolique, qui s’inscrit en écho avec les préoccupations du surréalisme.
Une maison-musée où palpite l’âme de Cocteau
Cet univers si spécifique s’inscrit au cœur de la maison de Cocteau. Poète, romancier, critique, dramaturge, cinéaste, dessinateur, Cocteau acquiert cette maison en 1947. Conquis par la quiétude et la beauté naturelle de Milly-la-Forêt, il y trouve un refuge idéal pour ses créations, un lieu parfait pour accueillir son entourage, des proches tels que Jean Marais, Édith Piaf et Pablo Picasso. Il y vivra jusqu’à sa mort en 1963, laissant son empreinte partout dans les pièces de cette demeure, qui en 2002, devient un musée dédié à sa mémoire et à son œuvre, grâce aux efforts de la Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent. Son but est désormais de préserver et de faire connaître le riche patrimoine laissé par cet artiste prolifique et visionnaire.
Les visiteurs peuvent y découvrir des pièces de mobilier d’époque, des œuvres d’art, des manuscrits et des objets personnels ayant appartenu à l’artiste. La chambre de Cocteau, son bureau, intacts, offrent un aperçu intime de son quotidien de créateur. Parmi les œuvres phares exposées, on peut admirer le lit de repos dessiné par Cocteau lui-même, ainsi que de nombreux dessins et esquisses. Une série de portraits réalisés par ses contemporains explore les multiples facettes de sa personnalité. Le musée organise également des expositions temporaires mettant en lumière différents aspects de l’œuvre de Cocteau et de ses collaborations artistiques.
La Chapelle Saint-Blaise-des-Simples : là où repose Cocteau
Non loin de la maison de Cocteau se trouve la Chapelle Saint-Blaise-des-Simples, autre lieu chargé de l’empreinte de l’artiste qui y est enterré. En 1959, Jean Cocteau est sollicité pour décorer cette petite chapelle dédiée à Saint-Blaise, patron des cultivateurs de simples, c’est-à-dire des plantes médicinales. Ses fresques, représentant des motifs végétaux et des scènes de la vie de saint Blaise, confèrent à la chapelle une atmosphère à la fois mystique et bucolique.
Ces peintures murales, d’une rare délicatesse, témoignent de l’amour de Cocteau pour la nature et pour les traditions populaires. La chapelle, désormais classée monument historique, est un lieu de recueillement et de contemplation, où l’art et la spiritualité se rencontrent harmonieusement. La voix de Jean Marais y résonne en boucle pour évoquer l’œuvre du poète. À l’extérieur, un jardin de simples attend le visiteur qui peut y flâner à la découverte de ces herbes qui soignent depuis la nuit des temps.
Pour tous ceux qui admirent Jean Cocteau, Milly-la-Forêt est un lieu incontournable. La maison, avec ses souvenirs d’artiste, et la chapelle, avec ses fresques oniriques, forment un ensemble exceptionnel qui permet de mieux comprendre l’homme et l’œuvre. Cocteau lui-même a un jour écrit : « Ce que le public te reproche, cultive-le, c’est toi. » À Milly, tout respire cette singularité qu’il revendiquait avec force, et qui fait de lui un artiste inclassable.
Pour en savoir plus et préparer votre visite, consultez :
- le site de la maison Jean Cocteau
- le site de la chapelle Saint-Blaise des Simples.
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