Excalibur (1981) : plus qu’un film, une œuvre magistrale qui a redéfini à jamais la légende arthurienne. Cinéaste audacieux et visionnaire à qui l’on doit entre autres Zardoz et Delivrance, John Boorman a transfiguré le mythe pour en faire une fresque brutale, mystique. Une référence.
Magie et sauvagerie
L’histoire, on la connaît. Un jeune écuyer, fils bâtard et caché d’un roi destructeur, dégaine une épée magique coincée depuis des lustres dans un rocher d’où personne n’avait pu la déloger. L’écuyer devient le roi Arthur, fédérateur et juste. Mais le Mal, la trahison le cernent, l’écrasent, le plongeant dans la douleur ; avec lui l’ensemble du pays sombre dans un gouffre de souffrance. Il devra combattre les forces obscures, triompher par son sacrifice pour ramener la vie dans le monde.
Christique : l’histoire du roi Arthur, avec en son sein la quête du Graal, est fondatrice de la chevalerie dont elle va inspirer les codes. C’est aussi un pilier de la culture littéraire occidentale, un mythe incontournable. Qui va s’éroder avec le temps avant que Boorman ne le réveille. Avec violence. Car sa vision si elle est teintée de magie, de sorcellerie, est aussi d’une grande rudesse. Les armures que portent les acteurs sont lourdes, ô combien, les combats d’une rare sauvagerie.
Une chevalerie revisitée
Loin des récits édulcorés, Excalibur explore une chevalerie âpre et féroce. Boorman ne s’intéresse pas qu’aux affrontements ou aux questions d’honneur : il plonge dans les zones d’ombre, les failles humaines, les contradictions de ses héros. La Table ronde se révèle un idéal impossible à maintenir ; la quête du Graal s’avère une métaphore spirituelle lourde de sacrifices.
Ce réalisme cru contraste avec la dimension mystique omniprésente : Merlin, énigmatique, excentrique même, semble détaché des notions humaines de bien et de mal ; l’épée Excalibur devient un totem, un lien sacré entre l’homme et le divin. Les mains diaphanes de la Dame du Lac, les incantations maléfiques de Morgane… Boorman mêle le sacré et le profane, comme les chevaliers eux-mêmes, écartelés entre des idéaux élevés et leurs passions terrestres.
Une œuvre d’art totale
Visuellement, Excalibur est une claque. Il ne peut en être autrement. Les armures scintillantes capturent chaque rayon de lumière, des éclats verts qui captent la nature qui les cerne, transformant ces guerriers en figures presque surnaturelles. Les scènes de bataille, chorégraphiées avec une brutalité réaliste et sanglante, contrastent avec des moments d’onirisme pur, où le temps semble suspendu.
La musique amplifie la puissance du film, le haussant au stade du récit épique d’envergure. Wagner et Orff dominent la bande-son, conférant une dimension opératique à l’ensemble. L’iconique Carmina Burana lors des batailles est ainsi devenu indissociable de l’imagerie arthurienne. Chaque note, chaque image, chaque dialogue paraît taillé pour graver la légende dans l’éternité.
Un pari fou
La genèse du film vaut le détour. Boorman rêvait depuis longtemps d’adapter Le Seigneur des Anneaux ; faute d’accord avec Tolkien, il s’est tourné vers Le Morte d’Arthur de Sir Thomas Malory (un texte fondateur de la mythologie arthurienne). Cette contrainte s’est révélée une bénédiction : elle a donné naissance à un projet où les ambitions du réalisateur pouvaient s’exprimer pleinement.
- Tourné en Irlande, le film s’appuie sur des paysages d’une beauté stupéfiante (Boorman sait filmer la nature, en saisir la vibration, la puissance dévastatrice), qui posent le cadre sublime de ce conte où lumière et osbcurité s’affrontent.
- L’équipe inclut des noms désormais mythiques : Nigel Terry en roi Arthur, Helen Mirren en Morgane, Nicol Williamson en Merlin… Un casting brillant, complété par de jeunes talents alors inconnus comme Liam Neeson ou Gabriel Byrne.
- Mais c’est la direction artistique, avec ses armures étincelantes et ses jeux de lumière presque divins, qui marque durablement les esprits.
À sa sortie, Excalibur divise : trop dense, trop étrange, trop baroque pour certains. Mais c’est justement cette singularité qui va en faire une œuvre culte. Le film a influencé des générations de réalisateurs et d’artistes ; il reste une référence incontournable de la culture geek et du monde cinéphile.
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