Nouveau chapitre dans notre série Burlesque Planète, le Paris Burlesque Festival (PBF pour les intimes) 2012 marque d’une pierre conséquente notre exploration de cet univers avec un épisode vraiment surprenant puisqu’ originellement dédié… à la mort.
La mort comme thème imposé
Thème imposé de cette 4ᵉ édition menée bille en tête par Juliette Dragon, Seb le Bison et les Filles de Joie + guests, une Fiesta de la Muerte inspirée des croyances et rites mexicains, mais où nous avons également vu apparaître les spectres de la Faucheuse européenne, du Voodoo africain, du désormais incontournable zombi, déclinés pendant quatre jours de célébrations nichées dans le boudoir de la Bellevilloise.
Décidément, Thanatos a largement inspiré ces messieurs-dames en burlesqueries qui surent se déshabiller avec une grâce et une inventivité rare pour illustrer ce concept mythologico-philosophique par ailleurs d’autant plus délicat à aborder qu’il fallait tenir un programme lourd à savoir :
- Deux grandes revues « Pretty Little Monsters » et « Voodoo Western» jouées deux fois de suite ;
- Deux nuits clubbing déjantées « La Nuit Clandestine » et « La Nuit Fatale » avec concerts ;
- L’Hacienda de la Muerte et les multiples distractions de ce village mexicain directement inspiré des 7 Mercenaires mais en beaucoup plus dingue avec bar à tequila, podium de catch + les catcheuses qui vont n’avec, chapelle d’exorcisme, zombie peep show, tatoueuse djs set allumés, orchestre de mariachi, et lapin bleu à talons (2m20 de lapin bleu lamé, ça en jette croyez-moi, d’ailleurs big up au Bunny turquoise, son accent américain et sa voix de basse).
Sans compter l’élection de Miss Burlesque 2012, des expos, … et un travail de ouf pour préparer tout ça, de la part des artistes et des bénévoles qui ont soutenu l’action au niveau infrastructure. Bref ça n’a pas chômé et la Bellevilloise s’est transformée en ruche une semaine durant pour opérer cette impressionnante et très réussie métamorphose.
L’élection de Miss Paris Burlesque : la relève est assurée
Un festival très réussi et full au niveau de la fréquentation. Le public était au rendez-vous, fidèle et désireux de se lâcher dans la joie et la bonne humeur. Mission accomplie dès la première soirée avec l’élection de « Miss Paris Burlesque 2012 », la britannique Aurora Galore qui fera un numéro flamboyant et débordant d’énergie ( à en glisser du haut de ses talons aiguille, continuant malgré tout, débouclant son corset comme une panthère, bref une véritable nature), emportant les suffrages du public et du jury composé de Trixi Tassels, Dominique et Baptiste de RD Spectacle, Hervé de Phyléa, Miss Anne Thropy, Ismène la Modiste, Caroline de Scène d’Esprit et Scarlett Martini.
On notera au passage les prestations de Perle dont l’effeuillage débute par un monologue sur le thème de la poule de luxe pour soudainement déraper sur la métamorphose de la dame en gallinacée caquetant, Fatale Red Venom en femme araignée dévorant les arachnides qui l’entourent ou Luce Botillon, touchante bergère du XVIIIème siècle. Toutes nimbées de grâce … et dotées d’une discipline de fer, suivant en cela les préceptes explicités par Juliette Dragon lors de notre première rencontre.
Technicité et sens de la scène
De sacrées bosseuses donc que ces dames qui ajoutent à une technicité incroyable le sens du dramatique et de la scène. Autant d’atouts mis en avant lors de la revue à laquelle j’assiste le samedi soir, un Voodoo Western qu’animent les grandes performeuses Lady Adélaïde Greed (France), Lia Vinova (France), Tempest Rose (Royaume Uni) et ses danseuses (Camille, Roxi Divine), Glory Pearl (Royaume-Uni), Xarah von den Vielenregen (Allemagne), La Viola Vixen (Australie) , Trixi Tassels (Nouvelle Zélande), Roxy Diamond (Allemagne) – oui, elles sont vraiment venues de partout.
Et ces messieurs boylesques Wrong Note Rusty (Canada) et Gilbert De Moccos (Japon) n’ont rien à envier à leurs consœurs en matière de créativité et d’énergie ( Wrong Note Rusty a notamment une manière d’allumer les ampoules qui lui est toute personnelle et qui déchaîna les hurlements enthousiastes du public féminin dont votre humble servante, oui oui j’assume). Le tout alterne les numéros de danse du ventre, pyrotechnie, manipulation de serpents, dont certains ont été créés spécifiquement pour le festival et qui surprennent par leur haut degré de maîtrise, ainsi l’ultime numéro de la néo-zélandaise Trixxi Tassels, spécialiste des nippies enflammés et qui ôte corset et pantalon … à la torche.
Nues, flamboyantes et drôles
Des exercices de style que chacune aborde avec son caractère, sa poésie et sa plastique propres. Car sachez-le, sur la scène burlesque, toutes sont différentes, les canons de la beauté imposés par les diktats de la mode sont mis au rancart et nos Vénus se doivent d’être avant tout des personnalités. La patiente et langoureuse Xarah von den Vielenregen qui avale les roses enflammées, l’impériale Scarlett Martini aux éventails incandescents, … grandes, petites, opulentes ou toutes fines, blondes, rousses, brunes, elles sont belles, mon Dieu, mais belles, parce que rayonnantes, tranquilles, bien dans leur tête et dans leur peau.
Et drôles. Dotées d’un formidable appétit de vivre qui se rit de la mort qu’elles miment, ainsi Lady Adélaïde Greed qui ouvre le bal avec des incantations de sorcière barbare d’une intensité érotique torride soudainement interrompue par l’appel téléphonique d’un client demandant une voyance ou le fox trot très dévêtu, farfelu et tendre d’une Glory Pearl dépouillée de ses voiles de Parque pour nous adresser un clin d’oeil coquin et complice.
Audacieuses ? Certes. Glamour ? Sans conteste. Énergique ? Incroyablement. Mais avant tout, ces dames venues des quatre coins du monde nous rappellent ce qu’est l’élégance, cette phase de séduction devenue si rare et d’autant plus précieuse qu’elle incarne la vie.
Photos : Héloïse Siaud
Merci à toute l’équipe du Paris Burlesque Festival.