1er mars 2020 : Libération publie une tribune signée Virginie Despentes. Un crachat bien senti à la face du patriarcat conclu par le désormais célèbre «on se lève et on se casse». Une décision érigée en principe esthétique par le duo Mansfield.TYA qui affirme toujours plus sa talentueuse indépendance avec ce 5eme nagnifique album intitulé Monument ordinaire.
Refuser la fatalité
Désespérance assumée, poésie de l’amour perdu, abandon de l’être dévoré par la passion qui s’accroche au souffle de l’Autre … Rebeka Warrior et Carla Pallone déroulent ces 12 compositions comme autant d’odes à la destruction de l’être, seul ou à deux. Une destruction flamboyante, élégante, absolue … mais pas forcément irrémédiable.
De-ci de-là, une lumière, une porte entrouverte, un souffle d’air frais viennent alléger cette atmosphère funèbre … ainsi qu’une colère à fleur de peau. Un refus de la fatalité. Préférer s’auto-dissoudre volontairement que subir le poids du destin. Et croire parfois que tout peut arriver : « ô mon amour, accrochons-nous, les rafales ne détruisent pas tout. »
Une pulsion dark wave
Un peu d’espoir : une éclaircie même fugace dans les sombres cieux qui écrasent d’ordinaire nos deux héroïnes, adeptes d’un romantisme noir alourdi de percussions fatales, strié d’envolées baroques, de violons rageurs. Un peu d’amour aussi, tranquille, peut-être heureux qui sait ? Au son d’un piano sage, comme une chanson enfantine, une déclaration d’amour adolescente.
A peine maladroite, profondément sincère. Chérubin se déclarant à la comtesse, Radiguet le diable au corps, Sapho éperdue … « Une danse de mauvais goût » … et sa synthétique antithèse « Le sang dans mes veines ». Une pulsion dark wave qui anime l’album comme une réaction enchaîne. Un héritage de l’expérience Kompromat ? Une continuité du terrible « La nuit tombe »?
Menaçantes ritournelles
Allez savoir avec ces deux diablesses, qui mêlent français, allemand, italien dans ces ritournelles aux titres menaçants comme un caprice d’enfant bipolaire. Pour les accompagner dans ce voyage vocal, Odezenne et FanXao de Bérurier Noir, voix masculines très caractéristiques, qui rappellent que le tourment amoureux n’a pas de genre.
Et pour composer l’artwork symbolisant ce nouveau périple mélodique, Théo Mercier et Erwan Fichou qui enfouissent notre duo dans des sables mouvants, comme si la Winnie d’Oh les beaux jours de Becket avait enfin trouvé une sœur de souffrance avec qui dialoguer et retrouver son âme, sa rage, sa raison d’être et d’aimer, même si ça fait mal.
Et plus si affinités
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