« Celui qui maîtrise la narration maîtrise l’Histoire » ; c’est particulièrement vrai dans un pays qui n’en a pas. Dixit les USA vieux de seulement 250 ans, melting pot qui ne mélange rien, pays où la ségrégation est monnaie courante, où la violence est récurrente, où l’argent autorise tout, y compris la perte de mémoire. C’est sans compter sur des artistes de la trempe d’un Bryan Anthony Moore.
Le Monsieur se singularise par des fresques monumentales où des monstres déroulent leurs anneaux, à l’image des hydres mythiques. C’est un fait, B.A.Moore se plaît à chasser le Leviathan moderne, fidèle en cela au philosophe politique Thomas Hobbes. Et comme lui, il n’y va pas de main morte, caricaturant les grands de ce monde, Trump en tête, tronçonnant avec jouissance les serpents hideux du fric, des compromis, de la trahison.
Dégoulinantes, hachées d’inscriptions, ses pieuvres dénoncent la main mise des réseaux sociaux, la manipulation mentale à l’œuvre, l’irrespect flagrant des individualités. Violent, son trait évoque les gravures du XVIIeme siècle, les pamphlets des Lumières, les peintures rupestres, les planches de Crumb. Nous sommes ici dans un art charnel, viscéral, motivé par l’urgence et le ras-le-bol devant une société mortifère qui s’oublie dans l’adulation des Veaux d’Or numériques.
On peut faire confiance à Bryan Anthony Moore : tout sera fait afin de secouer son public, sans aucun ménagement et avec un sens évident de la provocation, du décorum et du message à transmettre, quitte à faire imploser sans ménagement des mythes nationaux qui n’en sont pas.
Et plus si affinités