Des devantures de magasins aux couleurs passées, des typographies désuètes, des peintures usées par le soleil et la pluie… et des portes fermées, des rideaux baissés, des vitrines vides. Voici le sujet de la série J’habite une ville fantôme du photographe Thibaut Derien.
Documenter l’agonie du petit commerce
S’écartant des grandes villes, Derien est allé se perdre dans les bourgades de la périphérie, en campagne, en province. Au fil de l’objectif, il saisit ces commerces abandonnés, comme un signe irréfutable de la désertification à l’œuvre, de l’abandon des petites villes au profit des mégalopoles dévoratrices.
Écrasés par les grandes enseignes, le développement des zones commerciales ouvertes aux voitures et à la grande consommation, l’avènement de la vente en ligne, les petits magasins n’en finissent plus de mourir. Une agonie que d’aucuns traduisent en statistiques, tableaux et diagrammes à l’appui, mais que Derien préfère observer sur site.
L’abandon d’une vie en commun
Ses clichés sont teintés à la fois de mélancolie, de regret, de questions aussi. Qui était à la tête de ce magasin ? Pourquoi avoir fermé ? Qui pour remplacer ? Et les habitants ? Qu’ont-ils fait ? Est-ce parce qu’ils ne venaient plus que le rideau a baissé ? Et maintenant ? Comment encore tisser du lien entre citoyens quand ces commerces de proximité ne sont plus ?
« J’habite une ville fantôme » : le titre de la série en dit plus long que toutes les études sociologiques. Chaque cliché dit la mort d’une époque, d’une logique, d’une vision du monde. Le délabrement d’un système au profit d’un autre. Le changement irrémédiable, ce progrès qui laisse toujours des victimes sur le carreau. Elle dit surtout l’abandon d’une vie en commun.
Et plus si affinités
Pour en savoir plus sur le travail du photographe Thibaut Derien, consultez son site.