19 mai 2018 : game over pour la 71eme édition du festival de Cannes. On remballe les robes à paillettes, les smoking, le tapis rouge et les flonflons, la Croisette reprend son calme de maison de retraite … restent les films récompensés, promis à devenir des classiques … ou pas. Car il faut parfois bien plus qu’une palme pour passer à la postérité. Ceux qui en doutent n’ont qu’à visionner les 20 documentaires qui composent la série Un Film & son époque- Il était une fois … le cinéma pour saisir que l’alchimie du succès tient à d’autres ingrédients, plus subtils, plus hasardeux, plus contextuels.
Aux commandes de ce florilège catapulté par nos toujours très inspirés petits camarades des Éditions Montparnasse (désolée d’avoir tardé sur les chroniques, les chéris, mais notre lecteur DVD a souffert grandement de notre transhumance en terre étampoise), Serge July qui prend la plume pour scénariser chaque exposé et Marie Genin from FOLAMOUR à la production. Sous leur loupe de connaisseurs, vingt fleurons de l’histoire du 7eme art, dont ils dissèquent les méandres, s’interrogeant sur ce qui fait qu’un long métrage passe à la postérité.
Le scénar ? L’interprétation ? Les dialogues ? La réal ? Un peu de tout ça à la fois ? Ou la rencontre entre une œuvre et son actualité, au point de saisir et refléter l’esprit ou les désillusions d’une période précise, voire d’accompagner les métamorphoses qui annoncent l’avenir ? Pas de réponse précise, bien sûr, les licornes ça ne s’attrape pas si facilement. Mais de confidences en témoignages, on saisit que tout est histoire de timing, de fulgurance, de rencontres, et de perceptions. Exemples :
Les scènes de massacre de La Reine Margot de Chéreau, calquées sur Le Radeau de la méduse de Géricault, les œuvres des maniériste set les photos charriées par les journaux télévisés déboulent en pleine guerre de Yougoslavie, au moment où le génocide rwandais se déclenche.
Le Petit Monde de Don Camillo de Duvivier aborde la question du fight entre démocratie crétienne et parti communiste italien sur fond de guerre froide, offrant par ailleurs une voie d’entente via ce tandem de vieux ennemis qui s’adorent malgré leurs différents, qui s’accordent toujours à faire le bien commun en dépit de leurs querelles.
Avec L’Empire des sens, Oshima explose les codes du pink à la japonaise, avec en tête l’esthétique des estampes érotiques nippones du XVIIIeme siècle pour conter à sa manière la passion tragique et transcendante de Sada Abe et Kishijo, résistance sexuelle larvée face aux codes d’une société puritaine confisquée par le fascisme militaire.
Je n’évoquerai pas ici les 20 films traités, ces documentaires le feront beaucoup mieux que moi (clin d’œil du reste à celui consacré au cultissime Le Père Noël est une ordure où l’on apprend qu’il est un digne héritage du cinéma italien, Affreux, sales et méchants en tête). Je ne peux que vous conseiller de visionner cette Bible, véritable leçon de cinéma pour tous, qui éclaire d’un jour nouveau et particulièrement précis des titres si célèbres qu’on en a oubliés les caractéristiques et le making-off. Dommage car celui des Tontons flingueurs vaut le détour. C’est l’occasion de profiter des explications de grands metteurs en scène, d’acteurs prestigieux dont certains ont rejoint le paradis de la pelloche, mais ces gars-là sont éternels !!!
Bref avec Un film & son époque, vous vous ferez un grand grand plaisir. Prévoyez néanmoins du temps de visionnage ; une fois terminé le documentaire, on n’a plus qu’une envie : revoir le film en question. Mais est-ce réellement un problème ?
Et plus si affinités
http://www.editionsmontparnasse.fr/p1848/Il-etait-une-fois-Le-cinema-Un-film-son-epoque-Coffret-DVD