Après l’exposition Balenciaga et son œuvre au noir au Musée Bourdelle, Christian Dior, couturier du rêve s’installe en majesté aux Arts Décoratifs pour célébrer les 70 ans de l’auguste maison de haute couture. Impossible de ne pas faire le parallèle entre ces deux génies de la mode, qui ont tant apporté à l’image de la femme. Dior particulièrement va repenser l’allure féminine en profondeur, au lendemain d’une Seconde Guerre Mondiale qui avait écrasé toute fantaisie.
C’est ce qui ressort de ces salles, de ces modèles exposés depuis l’entrée imposante, hommage vibrant à la célèbre enseigne de l’avenue Montaigne, où le légendaire tailleur « Bar » accueille le visiteur dans un salut léger de liane émue par le vent d’été, jusqu’à la grande salle de bal où une envolée de robes de soirée, mousseline et strass, soie et borderies, traînes et crinolines, illumine le regard, affole l’imaginaire ; on saluera du reste le travail de scénographie de Nathalie Crinière, qui réitère ici l’exploit visuel du mur de smokings de la rétrospective Saint Laurent.
A la ville comme à la fête donc, la femme Dior est une ballerine, fine, douce, élégante, une femme fleur, une corolle … fragile, souriante, elle métamorphose l’espace qu’elle traverse avec une aisance trompeuse. Car chaque création qui la magnifie résulte d’un travail d’architecte, précis, minutieux, exigeant. Chez Dior, le patron, la toile sont démiurgiques, une nef haute nous le rappelle, exhibant des dizaines de fondamentaux d’une blancheur de lait, qui dialoguent à l’infini pour conjuguer la grammaire stylistique du maître.
Une grammaire avec laquelle chacun des directeurs artistiques de la maison eut à composer, respectant ses principes tout en apportant sa patte. Yves Saint-Laurent, Marc Bohan, Gianfranco ferré, John Galliano, Raf Simons, Maria Grazia Chiuri … à ce jours, ils sont six à avoir relevé ce défi complexe qui implique de conduire l’enseigne Dior dans la modernité tout en respectant son dogme, transmis avec fidélité par ses couturières, de génération en génération. Un héritage de beauté lourd à assumer. Mais quel cartel !!!
C’est honneur que d’être ainsi adoubé par les mannes de cet homme cultivé, amateur d’horticulture, adorateur du XVIIIeme siècle et des grands peintres, ambassadeur d’un véritable art de vivre et d’une industrie du luxe qui implique encore des artisans au savoir faire séculaire. Demeure une inconnue … de taille. Les tenues exposées sont aux cotes d’une femme parfaite, mannequin élancé, déesse évanescente. Qu’en est-il des adaptations pour la femme du quotidien, celle qui est plus petite, plus ronde, plus forte, plus maigre ? Toutes les clientes de Dior n’ont pas l’heur d’afficher l’allure d’une nymphe éternelle.
Ce sont des êtres humains, avec les singularités qui font leur identité. On aimerait voir les modèles présentés tout au long de ce parcours magique adaptés à leur morphologie, en action dans la folie du quotidien, et non seulement sublimés durant un catwalk apprêté ou sur une photographie d’art scénographiée et retouchée. A n’en pas douter, la stylistique Dior les transcende, … mais comment ? Et elles, ces dames tout si différentes, quel supplément de vie apportent-elles à ces costumes divins, avec leurs âmes de femmes ?
Pour consulter l’album photos de l’exposition, suivez le lien.
Et plus si affinités