Alceste et sa Célimène, Harpagon, Tartuffe, Scapin, Monsieur Jourdain, Toinette, Agnès… avec plus de 350 personnages présents dans le théâtre de Molière, cela en fait du monde à vêtir, sans compter les changements de costumes, les tenues exubérantes, les jeux de scène, les danses indissociables des comédies-ballets. Bref, il y a forcément du remue-ménage dans les coulisses quand on joue les textes du « Patron », comme l’appellent encore et toujours les sociétaires de la Comédie-Française. Idem en amont, dans les ateliers de couture, où les couturiers s’ingénient à vêtir ces héros sous les directives parfois exigeantes de metteurs en scène inspirés.
Costume et définition des personnages
Eh oui, difficile de faire l’impasse : rien que le vêtement de cour du Bourgeois Gentilhomme est un morceau de bravoure à façonner, et il n’y a pas intérêt à le louper, sinon c’est tout l’effet visuel qui s’effondre, le gag qui perd de sa saveur. Maintes fois, le costume intervient dans la définition des personnages (les parures extravagantes des précieuses ridicules). Et puis n’oublions pas que Molière, outre ses talents d’acteur et d’auteur, était lui-même tapissier du Roi, issu d’une famille habituée au commerce du drap et courtisan, donc forcément sensible à la question des codes vestimentaires. L’exposition Molière en costumes proposée par le Centre National du Costume de Scène est donc légitime plus que légitime. Et l’occasion de replonger dans des décennies de mises en scène prestigieuses.
Des tenues emblématiques
Le costume de Louis Jouvet interprétant Don Juan, la robe de chambre de Louis Jouvet dans Le Bourgeois Gentilhomme, la lourde de cape de velours écrasant Roger Planchon dans le rôle de L’Avare… il y en a 130 comme ça, répartis en cinq salles thématiques qui en disent long sur la complexité d’un répertoire où la critique des mœurs est récurrente : « Des vices », « Religion et libertinage », « Servantes et valets », « Bourgeois et ridicules », « Pères et filles ». L’occasion de mesurer la créativité à l’œuvre chez des costumiers comme Christian Bérard, Macha Makeieff ou Christian Lacroix, les mutations opérées au fil du temps sur ces tenues emblématiques qui n’ont rien de figé.
Le plein d’archives et de détails
Respect de la mode du XVIIᵉ siècle, anachronismes et fantaisies, outrances et ascèses, il y en a pour tous les goûts, toutes les imaginations, avec en prime une foultitude de dessins, photographies, vidéos, le plein d’archives pour prêter vie à ces tenues fabuleuses dont on ne peut scruter tous les détails tant ils sont ouvragés. Même les plus simples sont trompeurs. D’où l’intérêt de plonger dans le catalogue qui complète ce très beau parcours signé Véronique Meunier-Delissnyder au commissariat d’exposition, Philippine Ordinaire à la scénographie, Nathalie Perrier aux lumières, Trafik à la conception graphique. Pour sûr, Molière aurait adoré !
Et plus si affinités
Pour en savoir plus sur l’exposition Molières en costumes, consultez le site du CNCS.