Dans notre désir de faire dialoguer les expositions, deux parcours semblent actuellement se compléter très harmonieusement tout en questionnant les origines et la continuité du processus créatif : Arts et Préhistoire et Picasso et la Préhistoire au Musée de l’Homme.
Arts et Préhistoire: Homo Sapiens artistique !
Si ses motivations exactes demeurent encore obscures pour les scientifiques, il est indéniable que notre vénérable ancêtre faisait de l’art. Et si vous en doutez encore, un passage dans les allées de cette exposition particulièrement bien orchestrée qu’est Arts et Préhistoire devrait vous en convaincre. Car il y a 45 000 ans déjà, nos ancêtres s’avisaient déjà de créer, et sur des surfaces très larges, en témoignent les gravures rupestres retrouvées dans une vallée du Portugal et s’étalant sur plus de 20 km de parois. Déjà la question du linéaire, chère aux galeristes et aux commissaires d’exposition ?
Mais il n’y a pas que les peintures rupestres et les Vénus replètes qui prouvent le sens créatif d’Homo Sapiens. C’est que nos aïeuls aimaient orner les outils du quotidien, ajoutant à l’aspect purement fonctionnel une volonté esthétique qui flirterait presque avec le magique. Le parcours met par ailleurs en évidence l’émergence de savoir faire, de techniques, mais aussi de sensibilités spécifiques à des zones géographiques. Nous voyageons ainsi de l’Europe à l’Asie, en passant par l’Amérique et l’Océanie, pour ressentir l’apparition de ce qu’il faut bien appeler des styles différents.
Picasso et la Préhistoire : histoire d’une fascination
Déjà, le parcours précédent mettait en évidence certaines œuvres contemporaines inspirées par la Préhistoire. L’exposition dédiée à Picasso enfonce le clou, dans la mesure où le peintre était particulièrement fasciné par cette période. En témoignent nombre de sculptures et de dessins, réalisés notamment pendant l’entre deux-guerres. Paumes de main, galets gravés, céramiques, l’influence paléolithique est ici indéniable et la source d’un imaginaire puissant.
Il faut préciser que l’émergence de Picasso en tant qu’artiste coïncide avec la découverte des peintures préhistoriques ibères qui vont amener à la reconnaissance de l’art paléolithique. Cette prise de conscience impacte forcément la créativité d’un génie prolixe dont le style a déjà une forme de parenté qui s’ignore avec les œuvres rupestres. De salle en salle, c’est une évidence qui tient presque du surnaturel et questionne très fortement l’acte artistique sous toutes ses formes, comme une émanation universelle d’un chamanisme intemporel.