Je chroniquais il y a peu le très réussi Hôtel du libre échange mis en scène par Isabelle Nanty à la Comédie Française … et continue avec Hôtel Feydeau orchestré par Georges Lavaudant au TNP. Un spectacle qui nous entraîne dans l’univers de quatre pièces : Feu la mère de Madame, Mais n’te promène donc pas toute nue, Léonie est en avance et On purge bébé. Ce cocktail du meilleur de chaque œuvre dessine une soirée burlesque, colorée et joyeuse.
Quand il écrit ces textes, Feydeau vient tout juste d’emménager à l’hôtel Terminus, pour cause de rupture conjugale. Ainsi ces saynètes font suite à ses plus grands chefs d’œuvre. Il y détaille les différentes facettes du délabrement du couple. Plus féroce que jamais, son vaudeville ici, ne traite pas d’adultère (pourtant l’auteur nous y avait habitué) mais plutôt des scènes de la vie conjugale, moins tragiques que le film de Bergman, certes, mais précurseur par de nombreux côtés du théâtre de l’absurde.
Un chapeau de paille d’Italie (TNP 1993), Un fil à la patte (Odéon 2001), Lavaudant, qui n’en est pas à son premier vaudeville, livre ici une version patchwork de qualité et sans longueur. C’est un beau retour aux sources pour cet ancien directeur du TNP et de l’Odéon qui revient en beauté investir ces lieux. Visuel et chorégraphié, on aime le ton léger du divertissement. Le décor est minimaliste qui mêle la Belle Époque et un modernisme sans faux pas. La sobriété exemplaire nous ravit avec ces grands espaces blancs agrémentés de fauteuils tapissés de velours aux couleurs flashy. La lumière et les costumes (pensés par Lavaudant lui même) renforcent la magie du moment.
Avec les portes qui claquent, la danse s’invite et le rythme s’accélère. Une chose est sure, on ne voit pas passer l’heure et demi du spectacle. La prestation de Manuel le Lièvre est remarquable. Endossant tour à tour plusieurs rôles, il réussit à nous surprendre, nous fait rire aux éclats, ainsi que toute cette joyeuse troupe, dans une ambiance agréable et communicative. La salle du TNP s’emballe, le public s’esclaffe, le pari est réussi.
Le vaudeville, genre mineur et sans prétention ? C’est oublier le grand soucis du détail, la mécanique complexe du rire, la critique sociale, le travail de l’interprétation. Ici tous ces ingrédients sont bien dosés pour obtenir un spectacle de qualité. Promis Monsieur Feydeau grâce à l’autre Georges (Lavaudant), avec ce très bel hôtel de sentiments, impossible désormais de vous classer dans la catégorie « vulgaire ».
Et plus si affinités
https://www.tnp-villeurbanne.com/manifestation/hotel-feydeau/