Déjà la pièce de Beaumarchais était un pur délire ; mise en musique par un Rossini de 24 ans au mieux de sa forme et de sa virtuosité, la comédie Le Barbier de Séville devient l’un des incontournables du répertoire lyrique, un véritable exercice de virtuosité pour tout chanteur qui se respecte et un feel good opera comme on en compte peu. Autant de paramètres que Laurent Pelly intègre dans une mise en scène in black and white, pleine d’énergies positives et de fous rires.
Un feel good opera comme on en compte peu
La scène du Théâtre des Champs Élysées se retrouve donc envahie de gigantesques partitions où la musique de Rossini défile à toute allure sous la baguette de Jérémie Rhorer tandis que chaque gamme plonge les personnages dans la folie. On connaît l’histoire : le jeune comte Almaviva se consume d’amour pour Rosine, recluse par Bartolo qui garde jalousement la belle pour en faire une épouse docile. Manque de chance, la demoiselle est intelligente et peu désireuse de se laisser mener à la baguette. Elle a très bien repéré ce beau garçon qui fait le pied de grue devant ses fenêtres, mais comment lui parler ? De son côté, Almaviva aussi cherche à entrer en contact avec l’élue de son cœur.
Acrobaties mélodiques
C’est Figaro, barbier de son état, qui, en digne émule du moliéresque Scapin, se chargera d’aider les amants, d’où un enchaînement de situations cocasses propres à l’opera buffa, que Rossini booste en compositeur génial, affamé d’existence, de bonheur et de prouesses vocales, quitte à condamner ses interprètes à la perfection, dans cet enchaînement frénétique d’acrobaties mélodiques qu’il leur impose pendant deux heures trente. Laurent Pelly en remet du reste une couche, déclinant l’intrigue comme un numéro de music-hall qui tient de la revue aussi bien que du tour de magie.
Un casting sans fausses notes
Habillés de noir dans ce décor surréaliste, les interprètes ont donc les coudées franches pour montrer l’étendue de leurs talents de chanteurs et d’acteurs… et ils s’en tirent avec les honneurs et un grand plaisir, si l’on en juge par les mines réjouies qui viennent saluer sous un tonnerre d’applaudissements plus que mérités. Pas de fausses notes dans le casting avec tout particulièrement un Florian Sempey irrésistible en Figaro et une Catherine Trottmann excellente en Rosina, sans compter Michele Angelini, Peter Kalman, Robert Gleadow, Annunziata Vestri qui tous participent de cette mécanique digne des gags d’Harold Lloyd.
En résumé, on en prend plein les tympans, les mirettes et les cœurs, dans un pur moment de plaisir lyrique qui rappelle que l’opéra fut et demeure un spectacle populaire, que tous peuvent et doivent s’approprier. Cerise sur le gâteau, ce spectacle a été fixé pour la postérité en DVD !