Enfin ! Enfiiiiiiiiiiiiin ! Merci Seigneur, la providence et tous les saints du paradis, merci dieux tout puissants du rock, Sainte Rita, Sainte Cécile d’avoir parachuté nos rockers chéris sur la capitale pour une date aussi occulte que foudroyante ! Un cierge, une neuvaine et une bouteille de whisky plus tard, nous ne nous en sommes toujours pas remis. Ébahis et heureux nous les avons vu prêcher en chair, en guitare et en os : The Chainsaw Blues Cowboys!
Quittant leur ranch grenoblois, le duo de bluesmen s’est offert une petite tournée de derrière les fagots, histoire de convertir le mécréant à grand renfort de riffs. C’est dans un obscur et anonyme sous sol de l’underground lutécien (oui oui ça existe encore) qu’ils officient devant un public recueilli d’aficionados, avides d’entendre la bonne parole, bibine à la main. Je suis bien sûr au premier rang, fidèle observatrice de la geste Chainsawienne, prête à dégainer le smartphone (mon appareil photo a rendu son dernier souffle, paix à son âme) pour immortaliser ce sermon que déjà je sens vibratoire et d’anthologie !
Pourtant Pasteur Lio et Diacre Erich prennent leurs marques avec la quiétude tranquille des Bienheureux, je distingue même une bouteille d’eau dans l’ombre, certainement pour baptiser les convertis, à moins qu’il s’agisse d’abreuver les artistes … Quiétude dans les gestes, l’installation sur les sièges, le test des micros, des instruments … jusqu’à ce qu’Erich balance les premières notes … et c’est l’attaque de Fort Alamooooooooooooooooo !!!!
Lequel pilote la diligence, du guitariste bardé de sa Fender Stratocaster 81 quand il ne saisit pas sa Archtop Airline 60’s ou sa Eastwood Tuxedo, ou du percussionniste, le pied à fond sur une authentique Farmer foot drum, fabriquée sur mesure et avec un amour infini du beau et du claquant au fin fond du Michigan (ouep la même ou presque que celle de la one woman band Molly Gene, entre autres) ? C’est en fait une direction collégiale, un numéro de duettistes rôdé au millimètre près que nous servent les comparses, avec le sourire des Justes et un rythme de dingue.
Du blues bien sûr, nous sentons le parfum un rien diabolique, la tristesse profonde, l’abandon fataliste. Mais malgré tout c’est l’énergie qui domine, produite avec l’abattage d’une centrale nucléaire par Lio qui chante ses textes avec l’ardeur fébrile du prédicateur illuminé, sous l’oeil protecteur de son complice. Du blues donc, du rock aussi et surtout, brûlant comme le sable du désert, juteux comme un fruit de cactus, puant comme des bottes de cowboy après une semaine de route.
Sale et lumineux, rugueux comme une selle de cheval, ridé et fier comme le visage d’un Comanche, du rock, avec comme esprits tutélaires flottant dans l’air au dessus de nos têtes Jack White et The Black Keys. Sincérité est le mot qui convient, fidélité et constance également. Professionnalisme, sens de la scène, partage … Il suffit d’entendre Erich parler de ses grattes pour saisir à quel point ces deux-là aiment la musique : « Ma Strat c’est ma première vraie guitare que j’ai achetée quand j’avais 20 ans environ, à mes tout débuts et elle me suis de partout ; pour les deux autres l’Archtop c’est une grand mère des années 60, que j’ai fait modifier, rajouter un micro teisco (japonais) de la même période ».
700 euros en promo mais «cette gratte est monstrueuse de sonorité, de confort de jeu, de dynamique, c’est une vrai tuerie ». Et la machine de guerre de Lio est du même acabit. 6 mois d’attente avant de recevoir la bête en direct de l’Amérique profonde. Voilà vous avez tout compris : ces mecs-là ne trichent pas, depuis presque dix ans qu’ils se connaissent, créent et tournent ensemble, foutant le feu sacré partout où ils bivouaquent, leurs deux albums au chaud dans la diligence. Intimes c’est sûr, en osmose, c’est certain, investis c’est indéniable. Libres et autonomes : on aimerait les voir sur des scènes plus grandes, car ils ont la poigne, le volume, la présence pour prendre en main des audiences importantes.
Cela ne devrait pas tarder, Cédric, un tourneur de chez Baam Productions ayant jeté son dévolu sur eux. En attendant c’est avec la régularité d’un métronome divin qu’ils écument les salles, gagnant à la cause du rock une assistance toujours plus nombreuse et prête à s’éclater. Bons à l’écoute, ces messieurs une fois encore vérifient le vieil adage musical : « un bon live ne saurait mentir » !
Et plus si affinités
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