Affiche stylée déclinée en t-shirt par le réalisateur, musique originale composée par Lorenzo Senni (élite souterraine et néanmoins incontournable de la scène électronique italienne), cinéaste coaché par une galerie … On pouvait craindre de voir The Challenge arriver avec de gros sabots arty, nous toisant de regards ultra-contemporains, de fulgurances plastiques, voire de provocations faciles … Et ce n’est pas un monolithe noir, marquant un peu lourdement l’entrée sur un nouveau territoire, voire une nouvelle planète, qui allait nous rassurer.
Pourtant, à l’instar de L’Ornithologue, il fallait encore donner raison aux oiseaux. Les faucons, cette fois. Héros éternels, acteurs et observateurs souverains de ce documentaire maximaliste et sans commentaire. 70 minutes qui laisseraient filtrer des pistes de fictions en plein désert du Qatar. Récit sophistiqué et luxe triomphant nous renvoyant, ce n’est pas une première, à l’étalage brillant du Miami Vice de Michael Mann.
Vente aux enchères des rapaces via i-phone, virée de bikers dont le chef de file pilote une Harley en or, rallye/contest de 4×4 rutilants, surfant dangereusement sur la paroi d’une dune, ou encore une panthère, co-pilote d’une voiture de sport en vitesse de pointe. Grillant au passage tous les programmes bas de gamme sur des véhicules ou compétitions ridicules, on peut quand même se demander où vont nous mener toutes ces activités vaines et inutiles.
Car Yuri Ancarani tente ici un grand écart impossible entre tradition et modernité, un souci qui planait au-dessus de cette édition de Locarno comme sur le cinéma d’aujourd’hui. Tous ces rassemblements ne sont que des divertissements légers face à la cérémonie à venir, organisée depuis des siècles. Ils brouillent les pistes et les valeurs, notre rapport à l’histoire. En alternance avec ces séquences, on suit le parcours d’un fauconnier, qui en avion ou en voiture, va rejoindre ce challenge avec ses animaux.
A l’heure du drone roi, il y a quelque chose de l’ordre du fantastique qui passe dans le périple des faucons. De leur « volière » qui inaugure le film jusqu’au moment de la compétition. En relevant le défi technique de cette relation homme-animal (une minuscule caméra est installée sur l’oiseau pour suivre sa stratégie aérienne), The Challenge devient fascinant. Redessinant l’idée d’une belle image, avec cet écran géant, toujours en plein désert, qui va diffuser le tournoi ancestral. On songe à une illustration datant de l’Antiquité qui laisserait apparaître une fanzone dans ses détails. Derrière le contexte délirant, un travail d’observation magnétique.
Et plus si affinités
http://www.pardolive.ch/fr/pardo/program/film?fid=891437&eid=69&