Jusqu’au 21 janvier 2018, une partie de la collection Whitney Museum of American Art de New York, véritable anthologie de l’art américain du 20eme et 21eme siècle, s’invite au sein du Musée Maillol pour l’exposition Pop Art – Icons that matter. Une excellente manière de (re)découvrir et appréhender le mouvement culturel mondialement connu, vulgarisé certes mais souvent trop peu explicité. Une soixante d’oeuvres sont ici exhibées parmi lesquelles des incontournables du genre signées Rauschenberg, Johns, Oldenburg, Warhol ou Lichtenstein, mais aussi des œuvres moins connues d’artistes comme Segal, Drexler, Stenvens et Wesley.
Qu’est ce que le pop Art ?
C’est certainement la question à laquelle l’exposition tente de trouver une réponse sans pour autant l’enfermer dans une définition. Ce mouvement artistique né durant des années 50 se détache des traditions pour se focaliser sur des éléments visuels de la culture populaire. Il donne ainsi le statut d’œuvre d’art à ce qui ne l’était pas initialement, se positionnant alors comme une réaction face aux idées dominantes de l’expressionnisme abstrait. La définition de Lichtenstein affine ce point de vue : » Le Pop Art regarde le monde, il semble accepter son environnement qui n’est ni bon, ni mauvais mais différent. Un autre état d’esprit ». L’exposition n’enferme pas le courant dans sa dimension historique : entre objets du quotidien et figures iconiques, elle célèbre et critique le « American Way of Life ».
Warhol mais pas que …
Pas d’ exposition Pop Art sans un Warhol accroché fièrement à l’entrée. Ici pourtant il se fait longtemps attendre, laissant les premières places à d’ autres artistes. Il y a bien un Marilyn, mais daté de 1967, il nous laisse perplexe par son caractère noir et blanc, son ton très sombre, inattendu. Nous retenons également notre souffle devant Electric Chair (1971), objet de supplice ultime rutilant sur un fond rose. Outre le maître Warhol, apprécions Ramos et sa sérigraphie Tobacco Rhoda (1965). Inspiré des comics, l’artiste place la femme dénudée au milieu d’objets de consommation. Ici la pin-up devient objet de convoitise affichée sur un paquet de tabac. De quoi nous interroger sur l’usage du corps dans la stratégie marketing.
Le trouble par l’amusement
Flags (1967) de Jasper Johns nous amuse avec son travail d’illusion. Le binôme système optique/système nerveux nous joue des tours jusqu’à ce que nous parvenions à identifier le célèbre drapeau américain. Ludique, Flags assume aussi parfaitement son côté critique. Il y a en effet une sorte d’équivalence entre le représentant et le représenté. Ainsi le spectateur a devant lui l’objet et la peinture qui ne font qu’un. Quant à la Madonna and Child d’Arcangello (1963), le tableau efface le visage de la première dame la plus célèbre des États Unis pour ne laisser en première ligne que sa fonction publique. Cette représentation dénote avec le Jackie de Warhol qui conjugue son visage à trois moments distincts de son existence, comme pour souligner son destin tragique.
Troublante et amusante, l’exposition Pop Art – Icons that matter nous invite à un voyage dans le temps et dans l’espace, qui se teinte de critique, celle de la démesure américaine telle qu’elle s’est affirmée dans les 60’s à l’heure des grandes revendications libertaires, de la lutte pour les droits des noirs et de la dénonciation de la Guerre du Vietnam. Cet « instantané » de l’Amérique n’a néanmoins pas pris une ride et continue d’enchanter l’imaginaire et le regard.
Et plus si affinités