Bon on va la faire courte : au détour d’une petite virée sur Inta, je suis tombée sur une petite perle punko-nippone, j’ai nommé AKaikurage !
Power trio à la japonaise
Une gratte ravageuse, une basse millimétrée, une batterie animée par l’esprit du taiko, et la voix égrillarde de la chanteuse (antithèse du chant guttural métal, mais tout aussi secouant en termes de sensation auditive), petite poupée insupportable qui allie la mignonnitude de Candy et le côté ravageur du fantôme de Ring : le power trio Akaikurage fonctionne du tonnerre de Zeus, pour secouer les méninges d’un public qui en redemande.
Les compères ont pris le temps de rôder la formule spécifique à leur rock garage mâtiné de punk. La rencontre a lieu en 2014 ; à l’origine, Natsuo (la chanteuse guitariste) et Matsuna (le bassiste) voulaient faire du théâtre ou de la danse ; mais le démon du rock est fort heureusement passé par là, ainsi que le batteur Gerushi. Les conditions de décollage sont optimales, il n’y a plus qu’à. Le premier album sort en 2018, suivi de deux autres galettes, de tournées nationales et d’une incursion au Canada.
Lolita cannibale
10 ans plus tard, honnêtement, ça crache, et ça crashe et ça clashe ! Plutôt calme et réservée en coulisses, la donzelle se lâche sur scène que c’en est un vrai bonheur. Un véritable petit pois sauteur, un côté Lolita cannibale qui en fera fondre plus d’un, et derrière les deux acolytes, posés comme des bonzes. Un régal de foutage de gueule libérateur et jubilatoire avec des textes à l’encan. Je cite :
« 目が覚めるあの飲み物頂戴、残さず全部こぼすから。
甘ったるい言葉探して苦々しい記憶溶かします、どれだけ甘くしたっけ?忘れた、美味しけりゃいいの。 »
Traduction dans la langue de Shakespeare (chopée sur le compte insta du groupe, merci d’y avoir pensé) :
« Give me a bitter drink to wake me up. But I’ll spill it all on the floor. I’ll search for sweet words to melt my bitter memories. How sweet did I make it? I forgot, as long as it tastes good, that’s fine ».
Ce qui dans l’idiome de Molière donnerait :
« Donnez-moi une boisson amère pour me réveiller. Mais je la renverserai sur le sol. Je chercherai des mots doux pour faire fondre mes souvenirs amers. À quel point l’ai-je rendu sucré ? J’ai oublié, tant que ça a du goût, c’est bien ».
Compos urticantes
Voilà, voilà. Byebye les gentilles idoles fringuées comme des petites filles modèles. Ici, on donne dans le trash assumé, l’éventration mentale, sourire aux lèvres et doigt d’honneur levé bien haut dans le ciel, sur fond de sakura en fleur. Méduse rouge ou ortie royale au gré des traductions automatiques (désolée, votre humble servante ne maîtrisant guère la langue de Kurosawa et Hokusaï, elle doit s’en remettre aux ténébreuses forces de Deepl, ça aide quand même), Akaikurage ne manque guère de piquant.
On peut même dire que les compos sont volontairement urticantes, un peu comme si on gobait un morceau de Fugu préparé par un cuisinier sous amphets. Certains iront direct vomir dans les toilettes, d’autres (dont je me revendique haut et fort) se laisseront joyeusement intoxiquer par ce poison sonore 100% made in Pays du soleil levant, option kamikaze mélodique. Et ils risquent fort de tomber accro, conquis par ce vent de fraîcheur venu d’Orient extrême pour sauver nos pauvres oreilles affamées de bon son.
Pour en savoir plus, consultez le site d’Akaikurage ainsi que son compte Instagram.