Imaginez un peu qu’un jour, autour d’une table, Shakespeare, La Fontaine et les frères Cohen se collent autour d’une table, bière et hamburgers à portée de main, pour écrire ensemble … le résultat pourrait être celui-ci :
TWO HUNDRED THOUSAND DIRTY [Official French Trailer] avec sous-titres français from Loop di Loop Productions on Vimeo.
Réalisé par Timothy L. Anderson qui signe ici son premier film, Two Hundred Thousand Dirtyest une fable. Ratée. Un des personnages l’admet, avec philosophie, acceptant la fatalité de ce rôle de looser éternel qu’il partage avec ses camarades : des vendeurs de matelas paumés, dans un centre commercial paumé, dans un bled paumé … Nous sommes à la périphérie de Las Vegas, mais ici pas de richesses bling bling ni de casino. Juste des matelas, des nanas fantasmant sur des amants habillés en chef indien et quelques rares clients, chiants comme la pluie.
Et voilà que dans ce gentil ron-ron assez médiocre, débarque une belle argentine en détresse, qui va déclencher les emmerdements et les amertumes en cascade. Le vent de l’aventure ? Ou son illusion ? Tous ces messieurs en mal de changement vont suivre cette piste aguichante aux parfums de transgression, allant jusqu’au meurtre … une piste qui ne les mènera nulle part. Même pas vers une morale de l’histoire. Ennui, résignation, … les héros de Timothy L. Anderson ressemblent beaucoup à ceux de Ry Cooder : des perdants, antithèse du rêve américain.
Est-ce pour cette raison que le film puise dans les ambiances corrompues de Tennessee Williams et William Faulkner, sorte d’inversion du magique Bagdad Cafédébouchant sur une relecture de Kill Me Again ? Outre une interprétation impeccable des acteurs, avec l’apparition du rappeur Coolio dans le rôle cocasse d’un voyou repenti et raté dont le bagout ne dépareillerait pas dans un film de Tarantino, notons un travail intéressant sur les cadrages, qui ajoute très nettement à l’effet dramaturgique du film.
Ciblé sur des lieux précis, souvent en intérieur, dans des espaces géométriques striés de lignes et d’angles droits où les lumières indirectes se fondent dans les ténèbres, le long métrage ménage les silences, les pauses, les longueurs, entrecoupés de rebondissements cocasses et de retournements de situation surprenants. A voir donc car la narration est originale juxtaposant les genres narratifs et les influences, pour un effet décalé très accrocheur.
Et plus si affinités