En dessinant ses nus, Degas cherchait à capter le mouvement. Une gageure pour l’image fixe, qu’elle soit peinture ou photographie. Le corps nu, dépouillé de sa gangue de tissu, serait-il plus facile à saisir dans son évolution ?
Capter la dynamique de la chair, des membres, du visage : exercice de style d’autant plus complexe qu’il peut devenir le révélateur de l’âme, de l’essence du sujet. Certains photographes vont privilégier la pose de ce dernier, contemplative, une vie suspendue qui scrute l’objectif ou l’horizon c’est selon.
D’autres vont choisir délibérément de traquer l’action, le geste, l’énergie. Parmi eux, trois ont retenu notre attention par l’originalité de leur approche et des procédés employés, des effets obtenus, du message véhiculé.
Des enfants de Degas ???
Hervé All – Women Lightscape
Une femme, trois mouvements, un flash dans la pénombre : voici les ingrédients qui composent les clichés d’Hervé All. Cela paraît simple, dit comme ça, mais le travail d’Hervé va beaucoup plus loin dans l’exploration de ce qui caractérise la féminité universelle. Un corps, une sensualité, une détermination, …une âme ?
Ces femmes qu’il caresse de l’objectif, il les retrouve chez elles, dans leur intimité : elles choisissent elles-mêmes les trois attitudes qui composeront cette chorégraphie entre crépuscule et aube, où elles dévoilent un instant leur identité, leur personnalité, leur secret. Certaines effrontées, d’autres tranquilles, les bras croisées, assises ou couchées.
Offertes jamais, confiantes souvent, révélées autant qu’elles le désirent.
Maud Chazeau – A fleur de peaux
Encore du mouvement, encore du nu, mais cette fois-ci mascculin et photographié par une femme. Maud Chazeau enveloppe ses modèles dans les voiles de leurs oscillations. Troubles, incertains, fragiles.
Les musculatures se devinent plus qu’elles ne s’imposent, dans les lumières et les ombres qui jouent entre elles. Jamais statiques. Très pudiques, désincarnées. Le noir et blanc leur confère une distance, un anonymat qui rehausse la question de leur humanité. Emouvant et sensuel à la fois, on aimerait les saisir et les stopper dans leur course. Pour voir, scruter, dépasser le caractère fugitif.
Olivier Valsecchi – Dust
Des hommes, des femmes qui ébrouent leur nudité cendrée comme de jeunes chevaux, des êtres qui se dégagent de la boue originelle pour naître à l’humanité pensée et sensible.
Les photos d’Olivier Valsecchi nous prennent à la gorge par leur beauté et le message puissant qu’elles véhiculent : elles mettent en question ce que le terme « nu » veut vraiment dire. Elles interrogent également les codes de représentation, la notion de geste et d’immobilité, de suspension dans l’espace temps.
http://www.oliviervalsecchi.com
Et plus si affinités
Dossier La vérité Nue
La vérité nue : quand l’image dévoile les corps La vérité nue / Hervé All – Maud Chazeau – Olivier Valsecchi : Le corps en mouvement, les mouvements de l’âme ?La vérité nue / Simon Jourdan : « un regard sur le corps »La vérité nue / Pierre Cambon : Le corps et l’ombre« Cold » experiment / Pénélope Octavio : la vérité nue … sort des frigos.