Dernier temps de ce vendredi de Plateaux à la Briqueterie , on présentait dans la grande salle du théâtre Jean Vilar de Vitry sur Seine, la dernière pièce de Radhouane El Meddeb Face à la mer, pour que les larmes deviennent des éclats de rire, qui en ouvrait par ailleurs la saison 2017/2018.
Cette pièce est l’occasion pour le chorégraphe tunisien de réunir différents artistes de son pays (comédiens, danseurs, musiciens… ) et d’interroger la nouvelle réalité à laquelle le peuple fait face après la révolution. Un chanteur, un musicien et huit interprètes forment ce peuple-chœur. La présence au plateau de ces dix personnes donne un échantillon de cette population qui s’est battue pour plus de démocratie. Par de simples déplacements, souvent linéaires, ils se croisent, se suivent, tout en faisant toujours face au public. Le public comme cette mer nommée dans le titre du spectacle. Qu’est-ce qu’ils cherchent ? Qu’est-ce qu’ils veulent nous dire ? Avec certitude : ne pas baisser les bras, quand bien même la folie se fait jour.
Cette frontalité permanente, du début à la fin de la pièce, offre à voir un peuple debout qui fait face à son histoire et qui souhaite à n’en pas douter tirer son épingle du jeu. On perçoit fortement que quelles que soient les difficultés de mise en place des changements, la marche arrière n’est plus possible. Et même si les trajectoires individuelles varient, le temps est venu de se réunir pour danser, chanter, se porter et construire un avenir plus juste où les larmes cèdent la place aux rires. Belle scène, où les danseurs se retrouvent en ligne, se prennent les mains et frappent le sol à la manière des danses traditionnelles de groupe.
Ce qui émeut dans le spectacle de Radhouane El Meddeb c’est cette addition d’individus qui forme un groupe uni quoi qu’il arrive. La folie de l’un, le doute de l’autre, tout est possible mais les avancées ne se feront qu’unis. Les interprètes nous regardent debout, marchent de face, de profil, veillant à ce qu’aucune collision ne s’opère. Les trajectoires sont droites, claires et vives. Les corps sont tenus et ancrés même lorsque les danseurs se portent entre eux. Autre belle image que cette délicatesse avec laquelle l’une s’abaisse afin que l’autre puisse monter sur ses épaules, chacun est porté comme une pierre précieuse. Chacun aide l’autre à voir au-delà.
Face à la mer, pour que les larmes deviennent des éclats de rire, est une pièce intéressante pour le regard que pose le chorégraphe sur l’actualité de son pays. Les chants de Mohamed Ali Chebil et les compositions musicales au piano de Jihed Khmiri participent à cette vitalité inhérente à tout peuple qui déplacent les lignes et frontières dans lesquelles on veut l’enfermer. Cependant la pièce mériterait d’être resserrée. L’image principale de ces corps marchant en silence, face au public, est forte mais sur la durée paraît trop ténue et ce malgré les soli la ponctuant.
Et plus si affinités