Octobre, ses feuilles qui commencent à tomber, Halloween en approche et le MaMA, bien sûr ! En quinze ans (putain, déjà ?), le Marché des Musiques Actuelles est devenu LA référence, l’event « musiques actuelles » à fréquenter au seuil de l’automne, notamment pour les pros du secteur qui y trouvent l’inspiration/y mettent en avant les jeunes talents/envisagent leur programmation à venir. Initialement conçu comme un préquel du Printemps de Bourges, le MaMA n’est rien sans ses showcases. L’occasion pour votre humble servante de revenir sur ce passage obligé qui en a fait galoper plus d’un (qui n’a pas piqué un sprint d’une salle à l’autre le long de l’axe Pigalle Anvers pour couvrir un max de ces petits concerts). Parce que si le showcase est couru, c’est aussi car c’est un exercice de style exigeant, pour ne pas dire crucial.
Pas le droit à l’erreur
Posons le cadre pour ceux qui auraient un peu zappé : le MaMA, c’est trois jours de concerts, 160 artistes à la louche qui jouent le soir répartis sur l’ensemble des salles du quartier Pigalle. Cela fait beaucoup. Et forcément, on ne peut pas tout voir, à moins de profiter d’un don d’ubiquité (Hermione Granger, ne sors surtout pas de ce corps !). C’est là qu’intervient le showcase. Organisé durant la journée, il offre un peu plus d’élasticité dans le planning, permettant à certains labels ou dispositifs de mettre en lumière leurs artistes. Boule noire, Bar à bulles, Les Trois Baudets, FGO Barbara, Centre culturel Jacques Bravo, École ATLA : tels étaient pour cette édition 2024 les centres névralgiques de la showcase mania.
Sur scène, des artistes boostés par le Chabada, Normandie Musiques Actuelles, Le RIF, Ma Cabane à Paname, Hello Music, La Coopérative de Mai, Grabuge, Groover et j’en passe, qui se produisent de 11h30 à 19h devant managers, tourneurs, programmateurs, bookers, journalistes. Autant dire qu’ils n’ont pas droit à l’erreur. Et pas l’ombre d’un public lambda venu faire la fiesta, pas de fans, pas de membres de la famille venus chauffer la salle. Leur prestation doit être réussie sans claque ni ambiance ; face à eux, des pros exigeants venus les évaluer, mesurer ce qu’ils ont dans le ventre, s’ils sont bankables. Juger s’ils tiennent la route en live, s’ils ont ce qu’il faut, si leur univers correspond au festival qu’on représente, la salle qu’on anime.
Gros enjeux à la clé
Le showcase constitue donc un enjeu clé pour l’artiste, mais aussi pour tout son entourage professionnel. En d’autres termes, si on se plante, on se plante tous ensemble. Mais encore ?
- Pour l’artiste, le showcase est souvent sa première prestation devant un public de pros (rappelons qu’au MaMA, il s’agit de pros à l’international, qui viennent d’Europe, du monde entier). Chaque minute compte pour capter l’attention des décideurs. Si l’artiste réussit à impressionner tout ce petit monde, cela peut ouvrir de nombreuses portes : signature de contrats, programmation dans des festivals nationaux et off-shore, attention des médias donc visibilité accrue.
- Pour le manager, le showcase constitue un outil stratégique afin de négocier de nouveaux contrats et maximiser les opportunités. Bonne prestation de l’artiste lors d’un showcase = levier pour obtenir des tournées, négocier des conditions plus avantageuses avec un label, sécuriser des collaborations avec d’autres artistes ou producteurs. Et démontrer que ledit manager est bon dans son domaine, qu’il a du flair, de la pédagogie, bref qu’il sait coacher un musicien ; donc s’imposer comme une valeur sûre auprès de ses pairs.
- Si l’artiste a déjà un producteur, ce dernier va profiter du showcase pour valider ses investissements (temps, argent, ressources, enregistrement, production de clips, etc.) en démontrant le potentiel de son poulain. Il va aussi remporter sa mise via de futurs contrats, des dates de concert, des ventes d’albums.
- Pour le label s’il y en a un, un showcase réussi va convaincre d’autres acteurs de soutenir l’artiste, que ce soit au niveau de la distribution, des médias ou des programmateurs de festivals.
Petit format sans fioriture
On résume : le showcase est un cercle vertueux. Un artiste qui sait performer en showcase sera plus facile à vendre et à promouvoir. Cette prestation porte donc les espoirs d’une équipe en sus de ceux du musicien. Autant dire que la pression est importante, car qui dit showcase dit petit format (une demi-heure à tout casser) sans trop de fioriture : juste l’artiste et sa musique, sans tout le tralala d’éclairages savants, d’effets vidéo. Une carte de visite en mode amplifiée. Un instant T. Si on se loupe, la route sera plus longue pour percer (d’autant que c’est un petit monde que celui de l’industrie musicale, tout le monde s’y connaît, les rumeurs vont bon train, un flop se sait vite, très vite). En revanche, si on fait mouche, c’est la porte ouverte aux dates, aux signatures, aux articles. Bref, une carrière peut être boostée en une demi-heure… ou basculer.
Au niveau du MaMA 2024, le showcase relève de l’institution. Vous avez sûrement noté le nom des salles choisies pour accueillir le cru de cette 15ᵉ session. On ne rigole pas : certes, ce n’est pas le stade de France, mais on est quand même sur des noms prestigieux, avec des espaces qui vont du bar à la salle intimiste en passant pas la salle de concert de faible jauge (pour info, le show case peut aussi avoir lieu dans une boutique, un restau, une galerie d’art…). Pas forcément la même acoustique, le même équipement, la même qualité de son. Angoisse. Et puis il va falloir harponner l’attention d’une audience prompte à la nonchalance, qui en a beaucoup vu/entendu/vécu et qui ne se laisse pas séduire au premier accord.
On résume : le showcase est exigeant, les enjeux sont énormes, surtout dans un contexte aussi concurrentiel que celui du MaMA. C’est un moment clé où se jouent la crédibilité et le potentiel d’un artiste aux yeux de l’industrie. Il représente un tournant crucial qui peut déterminer la suite de sa carrière et l’avenir des relations professionnelles qui l’entourent. Voilà pourquoi il constitue un enjeu énorme et qu’il ne faut surtout pas négliger.
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