Le 18 mars de cette année nous rencontrions le directeur de L’aPOSTROPHE, scène nationale de Cergy Pontoise, évoquant avec lui une programmation pointue et ambitieuse. En point d’orgue le festival Théâtre et Politique avec à l’affiche l’adaptation du roman fleuve de James Ellroy American Tabloïd par le metteur en scène Nicolas Bigards. Et un véritable challenge à la clé :
2013/14 American tabloid – Bande-annonce par MC93Bobigny
En effet le premier opus de la saga consacrée par le fameux romancier à l’Histoire sombre de l’Amérique des 60’s est d’une rare complexité de par sa structure entrecroisant personnages fictifs et figures véritables dans une écriture nerveuse parsemée d’extraits de journaux à scandale.
Le roman orchestre un ballet morbide qui débute avec l’arrivée de Kennedy au pouvoir pour terminer par son assassinat ; entre ces deux pôles, l’énumération des temps forts de cette présidence tandis que dans l’ombre tous complotent la mort de JFK. De cette fresque sordide qui dévoile les sombres arcanes qui régissent pouvoir, mafia, media et cinéma, Nicolas Bigard tire une pièce intense qui transpose sur scène cette mécanique du destin.
Et la chose n’est pas aisée, car il fallut gérer la multitude des lieux, des personnages, des évènements historiques confrontés aux péripéties intimes. Délicat de plus de conserver la verve de Ellroy dans une traduction qui n’en trahisse pas l’énergie et la concision. Pourtant l’approche de Bigards est convaincante, respectueuse du rythme et de la tension initiales.
C’est que l’histoire de Kennedy se trouve être LA tragédie ultime, l’une des dernières grandes catharsis du XXème siècle, une histoire de sang, de mensonge, de violence, de puissance, où les intérêts divergent et s’affrontent, sous les sourires trompeurs, les attitudes de façade. Comme pour souligner ce va et vient entre extérieur et intériorité l’espace scénique se divise en bureaux cloisonnés de vitres, alvéoles où se nicheront les tableaux successifs de ce drame d’envergure shakespearienne.
C’est principalement cela que l’adaptation dramaturgique de Bigards met en relief, ôtant cette horrible marche à la mort de son atmosphère de thriller pour la placer sous les feux de la rampe dans l’univers théâtral qui lui confère sa dimension universelle, plaçant Kennedy au niveau d’un Richard II, d’un Jules César.
De fait le choix de ce spectacle précis comme mise en abîme d’une narration romanesque elle-même prisme révélateur du secret d’Histoire apporte du sens dans ce festival en reliant évènements politiques et mythe constitutif de l’Humanité.
Et plus si affinités