
Le concept d’uchronie est un terrain fertile pour la bande dessinée, les auteurs en tirent profit pour imaginer des réalités alternatives où des événements historiques prennent un tout autre tournant. Parmi les œuvres phares du genre, la sérieUchronie(s), écrite parÉric Corbeyran, illustrée par différents dessinateurs. Cette œuvre offre un exemple fascinant de la manière dont l’histoire peut être réinventée à travers des univers parallèles. Publiée chezGlénat, cette série en plusieurs cycles propose un voyage unique dans des mondes dystopiques, où des choix historiques ont radicalement transformé la société.
Le concept de l’uchronie en bande dessinée
Avant tout, commençons par faire le point sur l’uchronie. Le terme désigne un genre littéraire dans lequel l’histoire diverge à partir d’un événement clé, créant une ligne temporelle alternative. Ce concept, très présent dans les romans et le cinéma, s’invite également avec force dans le neuvième art : la bande dessinée est un terrain d’expression parfait pour déployer ces mondes possibles.
Dans le cadre de la sérieUchronie(s), Éric Corbeyran se saisit du concept et le développe à travers différents univers parallèles : New Byzance, New Harlem, New York, New Moscow, New Delhi, New Beijing. Chaque cycle de cette fresque questionne les conséquences d’une divergence historique majeure sur la société et les individus, proposant ainsi un regard alternatif sur les grands enjeux sociaux, politiques et économiques de notre actualité.
Les cycles d’Uchronie(s)
New Byzance
Dans cet univers, un attentat majeur à New York a conduit à la chute du capitalisme, remplacé par une théocratie fondamentaliste. Zack Kosinski, un « prescient » capable de percevoir d’autres réalités, travaille pour ce régime autoritaire. Cependant, lorsqu’il devient suspect, il est contraint de fuir et de remettre en question le système qu’il servait. Le dessin d’Éric Chabbert accentue l’atmosphère oppressante de cette société dystopique.
New Harlem
Ici, la communauté afro-américaine a pris le pouvoir, inversant les rapports de force ethniques. Zack Kosinski, toujours prescient, utilise ses dons pour rétablir la vérité historique dans une société où les Blancs vivent dans des ghettos misérables. Ce cycle, illustré par Tibéry, explore les thèmes du racisme, de l’identité et de la lutte pour l’émancipation.
New York
Dans un monde proche du nôtre, Zack se réveille après une décennie de sommeil induit par son père, Charles Kosinski. Soigné par l’infirmière Tia Brown, il est en proie à des visions de réalités alternatives, remettant en question sa propre existence. Djillali Defali illustre ce cycle introspectif qui examine les choix individuels et leurs conséquences sociales.
New Beijing
Dans cet univers, la Chine est devenue la puissance dominante. Zack et sa sœur Véronika tentent de comprendre les mécanismes de la « fusion noire », une technologie permettant de voyager entre les réalités. Aurélien Morinière offre un dessin détaillé qui reflète la complexité de cette société technocratique.
New Moscow
Ici, la Russie est au centre du pouvoir mondial. Zack et Véronika poursuivent leur quête pour maîtriser la « fusion noire », confrontés à des enjeux politiques et personnels. Nicolas Otéro illustre ce cycle où la tension est palpable.
New Delhi
Dans cet univers, l’Inde est la nation dominante, mais elle fait face à des crises écologiques majeures. Les jeunes Abha et Lakshmi incarnent l’espoir de leur peuple, cherchant des solutions pour pallier les pénuries d’eau, d’énergie et de nourriture. Djillali Defali revient au dessin pour ce cycle qui aborde les défis environnementaux.
Des thématiques universelles et complexes
Chaque saison de Uchronie[s] se conclut par un épilogue qui relie les différents cycles. Dans le premier, Zack et Tia tentent de retourner dans leur réalité d’origine grâce à la « fusion noire ». Le second épilogue approfondit les conséquences de leurs actions sur les multiples réalités. Ces conclusions offrent une perspective globale sur les thèmes abordés tout au long de la série.
Cette dernière explore des sujets universels et complexes, comme le pouvoir, l’identité, la liberté et la discrimination, en les intégrant dans des scénarios dystopiques où l’histoire a divergé. Chaque cycle pose des questions sur la manière dont l’humanité évolue face à des crises majeures, qu’elles soient politiques, raciales ou économiques.
Le traitement visuel de chaque volet, réalisé par des dessinateurs au trait défini et singulier, permet de renforcer les spécificités de chaque monde. Les styles graphiques varient en fonction des thèmes abordés, créant des ambiances visuelles cohérentes avec l’intrigue et le ton général de chaque arc narratif.
Ainsi, les différents cycles d’Uchronie(s)invitent le lecteur à s’interroger sur le monde dans lequel il vit et sur ce qui aurait pu advenir si certains événements historiques avaient pris un autre tournant. Mélange d’intrigue politique, de réflexion sociale et de mondes dystopiques, cette trilogie est une lecture incontournable pour les amateurs d’histoires alternatives et de science-fiction engagée, une réflexion fascinante sur les possibilités infinies du passé et de l’avenir.
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