Pourquoi ce soudain intérêt pour le ukulélé ? Peut-être parce que je viens de revoirCertains l’aiment chaudde Billy Wilder ? Et que Marilyn Monroe grattant frénétiquement son ukulélé en entonnant « Runnin’ wild » m’a donné envie de m’y mettre ? En tout cas, de m’y intéresser ? Who knows ? En tout cas, force est de constater que ce petit instrument, qu’on a désormais tendance à trouver au rayon « Jouets » ou « Musique » des enseignes culturelles comme Bax Music , en a pourtant sous le capot. On l’associe aux plages ensoleillées d’Hawaï, ce qui n’est pas faux, mais c’est ignorer le potentiel et le parcours d’un élément iconique de la culture pop.
Du Portugal à Hawaï
Qui dit « ukulélé » dit Hawaï. Le terme signifie littéralement « puce sautillante ». Une manière pour le moins poétique de désigner l’agile vivacité des doigts des musiciens sur les cordes. Une autre interprétation culturelle existe : « uku » signifie « cadeau » ou « récompense », et « lele » signifie « voler » ou « sauter ». Certains Hawaïens voient donc le ukulélé comme un « cadeau qui vole », en référence à sa capacité à transmettre des émotions et à voyager d’une âme à l’autre. Bref, étymologiquement, le ukulélé est empreint de joie, de liberté, de malice… et de croisement patrimonial ?
Sa naissance a en effet tout du conte de fées exotique. À la fin du XIXᵉ siècle, des immigrants portugais originaires de l’île de Madère débarquent à Hawaï. Dans leurs valises, un petit instrument à cordes appelé « braguinha », proche du cavaquinho portugais. Les Hawaïens sont immédiatement séduits par le son de cet instrument ; ils l’adoptent et le rebaptisent « ukulélé », probablement fascinés par le jeu des doigts sur les cordes.
Un symbole culturel
Le ukulélé ne va pas se contenter de son île. Très vite, il sort d’Hawaï au gré des échanges maritimes qui s’y déroulent, franchit les mers et les océans pour venir animer San Francisco et son Exposition universelle de 1915 ; le pavillon hawaïen a en effet eu l’idée pour le moins ingénieuse de lui donner la vedette. Succès au rendez-vous : le ukulélé s’impose comme le porte-étendard et le symbole de la culture hawaïenne. Et devient une source d’inspiration pour les artistes américains.
Durant les Années folles, Cliff “Ukulele Ike” Edwards, Roy Smeck, Laurel et Hardy, Buster Keaton, les ukulélistes prolifèrent aux USA, certains fondant l’ensemble de leur carrière et de leur succès sur l’usage du petit instrument si riche en effets mélodiques et comiques. Le ukulélé va aussi s’exporter en Europe : ainsi Maurice Chevalier va carrément promouvoir une méthode d’initiation en dix minutes.
Le sens de l’adaptation
Elvis Presley, John Lennon, Joni Mitchell, Eric Clapton, Brian May… le ukulélé va perdurer dans le temps en s’infiltrant notamment dans la sphère du rock et de la pop musique. Aujourd’hui encore, il continue d’inspirer des pointures comm Israel Kamakawiwo’ole et son célèbre medley « Over the Rainbow/What a Wonderful World » ou Jake Shimabukuro (dont l’interprétation de « While My Guitar Gently Weeps » prouve que le ukulélé peut rivaliser avec les guitares électriques les plus hurlantes). Eddie Vedder de Pearl Jam, lui consacre même un album entier en 2011 :Ukulele Songsélève alors l’instrument au rang d’icône indie.
Un beau parcours, n’est-ce pas ? Pas un hasard du reste si le ukulélé plaît tant. Compact, facile à prendre en main avec ses quatre cordes, orné parfois de couleurs acidulées, il attire les débutants qui veulent apprendre la musique sans y laisser leur compte en banque ni envahir leur séjour. C’est que ce petit instrument est facile à apprendre. Et puis il a su s’adapter remarquablement. S’il est initialement fabriqué en bois de koa, une essence locale hawaïenne, on trouve des versions en plastique dès les années 1950, ce qui le rend accessible aux petits budgets.
Un monde sonore
Un jouet ? Que nenni. Sous cette apparente simplicité se cache un monde sonore infiniment riche, capable de mêler la mélancolie des ballades à l’énergie brute du rock’n’roll. Nul besoin d’être un virtuose pour s’en emparer : quelques accords suffisent à transformer un dimanche pluvieux en fiesta improvisée. Le ukulélé apporte une légèreté bienvenue dans un monde souvent lourd et bruyant. À la fois intime et universel, il peut être mélodieux ou dissonant, acoustique ou amplifié. Il ne se contente pas d’être un simple instrument : il devient un prolongement de celui qui le joue, un moyen d’exprimer sa créativité sans limites.
Récapitulons : le parcours du ukulélé, de ses racines modestes à son statut d’icône musicale mondiale, illustre sa capacité à transcender les cultures et les époques. Plus qu’un simple instrument, il est le symbole d’une fusion réussie entre tradition et modernité. Revenons à Marilyn et son ukulélé, dansCertains l’aiment chaud: le ukulélé y apparaît drôle, charmant, déroutant, terriblement efficace quand il s’agit de capter l’attention, de transmettre une émotion. Que vous soyez fan de punk rock, de jazz, de pop acidulée, attrapez un ukulélé et laissez-vous emporter. Car comme le prouve Marilyn, parfois, il suffit de quatre cordes pour donner le ton !
Et plus si affinités ?
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